Littérature française

Damien Luce

La Fille de Debussy

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Chronique de Marie Michaud

Librairie Gibert Joseph (Poitiers)

Dans son troisième roman, Damien Luce prête ses mots et sa sensibilité à Chouchou, La Fille de Debussy, en imaginant le journal intime qu’elle aurait pu tenir entre la mort de son père et la sienne, survenue moins de deux ans plus tard.

« 25 mars 1918. Aujourd’hui, papa est mort. Au salon, on parle de la mort du “grand Claude Debussy”, mais qui se soucie de la mort du papa de Chouchou ? Il faut croire que la mort d’un “grand compositeur” est plus importante que celle d’un “petit papa” ». Ainsi s’ouvre le journal de Chouchou, 12 ans. C’est ce deuil qui la pousse à prendre la plume pour affronter la vie sans lui. Entre ses pages, elle va donner libre cours à son chagrin qu’elle tient étouffé, comme il se doit quand on est une jeune fille bien élevée. Mais presque immédiatement, c’est aussi la vie qui se glisse entre les lignes. Parce que Chouchou est tout simplement pleine de fantaisie, de rêves, d’idées, d’envies… Pour faire « démourir » son père, Chouchou conclut un « pacte » intime : jouer chaque semaine un morceau qu’il a composé. C’est à travers sa sensibilité – ou serait-ce celle de Damien Luce – que l’on découvre la musique de Debussy, véritablement indissociable de ce roman. Mais la musique n’est pas tout : Chouchou, amoureuse, rêve d’une fugue maritime qui n’aura jamais lieu, car la mort la fauche à son tour quelques mois plus tard. De livre en livre, Damien Luce fait résonner sa propre musique, délicate et émouvante. Il nous emmène dans des univers toujours un peu douloureux, mais dont la poésie permet de sortir grandi. À la date du 10 février, Chouchou cite une lettre d’un « capitaine compositeur » : « Ne laisse personne t’interdire d’être plurielle. […] Un être humain doit vivre dans toutes les pièces de sa maison intérieure. » Gageons que Damien Luce a fait sien ce principe, lui qui, non content d’être un pianiste de grand talent, a choisi d’ajouter des mots aux notes en devenant romancier et de prolonger l’univers de ses romans sur les scènes de théâtre.

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