Littérature française

\"Remake\"

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✒ Marie Michaud

(Librairie Gibert Joseph Poitiers)

En pleine rentrée littéraire, Belfond fait le pari d’une nouvelle collection qui conjugue le passé au présent selon un principe – apparemment – simple : un écrivain choisit une œuvre du patrimoine littéraire et en fait le remake.

« Tout est permis pourvu que le souvenir de l’original ne soit jamais perdu. » Trois auteurs ont ainsi choisi de faire revivre Ubu roi, Le cousin Pons et Bouvard et Pécuchet. Nicole Caligaris a transposé la quête délirante de pouvoir et d’argent de la pièce de Jarry dans un roman autour d’une sorte d’OPA interne sur la « DG Pologne » dans une holding financière. Elle semble s’être beaucoup amusée à jouer avec la démesure langagière de ce « personnage ni joli ni poli », comme elle le définit elle-même. De son côté, Bertrand Leclair a travaillé autour du Cousin Pons de Balzac. Évoquant son projet d’écriture en 2012, il indiquait : « Il ne s’agit évidemment pas de mettre une œuvre du passé au goût du jour, de tirer bénéfice d’une intrigue et de caractères qui ont fait leur preuve en espérant renouveler son premier succès public. Il ne s’agit pas plus de la rendre plus lisible ou accessible à un public réputé trop éloigné des œuvres […] plus encore que de tenter d’actualiser le geste de Balzac dans la société contemporaine, il s’agit de confronter cette société contemporaine à un mode de narration susceptible d’en révéler une vérité persistante. » On ne saurait mieux définir ce que doit être un remake qui a du sens. Bertrand Leclair a ainsi fait de Pons « un fastueux débris de 68 » aux prises avec les cyniques d’aujourd’hui, questionnant ainsi une autre forme de comédie humaine. Quant à Frédéric Berthet, dans Le retour de Bouvard et Pécuchet, il tire du silence les deux fameux compères imaginés par Flaubert pour confronter leur incomparable sens des réalités à la vie des années 1980. Ces trois premiers remake réussissent le pari de faire revivre des œuvres classiques en évitant l’écueil du pastiche et offrent aux lecteurs un plaisir nouveau : celui de la lecture croisée de l’original et de leur nouvelle version.