Littérature française
Camille Bordas
Des inconnus à qui parler

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Camille Bordas
Des inconnus à qui parler
Denoël
20/08/2025
480 pages, 22,50 €
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Chronique de
Stanislas Rigot
Librairie Lamartine (Paris) -
❤ Lu et conseillé par
7 libraire(s)
- Coralie Sécher de Coiffard (Nantes)
- Stanislas Rigot de Lamartine (Paris)
- Ellen Brezellec de Auréole (Auray)
- Marc Le Deunff de Mots d'ici et d'ailleurs (Landivisiau)
- Yassi Nasseri de Kimamori (Porto Vecchio)
- Margot Bonvallet de Passages (Lyon)
- Annabelle Woelfle de La Poterne (Bourges)

✒ Stanislas Rigot
(Librairie Lamartine, Paris)
Et si, avec ce récit choral racontant la dernière journée du semestre de la section Stand Up de l’université de Chicago, une auteure française avait écrit le meilleur roman américain de cette rentrée ?
Publié aux États-Unis sous le titre The Material en 2024, soutenu alors par, excusez du peu, Percival Everett et Rachel Cusk, le nouveau roman de Camille Bordas, son cinquième, arrive sous le titre Des inconnus à qui parler et on ne peut que confirmer ces louanges tant ce retour du roman universitaire à l’américaine, qui s’est fait plutôt discret ces dernières années, est une réussite. À noter que l’auteure a écrit le roman en anglais puis l’a réécrit en français (comme son précèdent livre). Nous prenons la direction de Chicago en décembre où c’est l’effervescence typique de la fin du premier semestre : les six élèves du master Stand Up, rattachés au département des lettres (dont les membres manifestent un « déplaisir courtois » face à la cohabitation imposée avec ce nouveau cursus), préparent pour le soir leur spectacle de fin d’année où chacun doit présenter un sketch sur scène. Du côté des enseignants, l’ambiance est elle aussi un rien électrique, notamment suite à l’annonce de l’arrivée de Manny Reinhardt, une des stars du genre qui doit rejoindre leur équipe pour le second semestre ; mais si son talent et sa popularité sont indéniables, des rumeurs pour le moins déplaisantes sont apparues ces derniers temps et sèment quelques doutes sur le bien-fondé de son arrivée. Et le long des quelques heures pour le moins mouvementées qui conduisent au spectacle, le lecteur va passer d’un personnage à l’autre, découvrir qui ils sont, leur vie, leurs problèmes, leur rapport au rire, à la création. Le récit est enlevé, fin, pertinent, drôle et émouvant ; il regorge de surprises et, s’il n’a pas l’ampleur des derniers Jonathan Franzen ou Nathan Hill, il tient sa place au cœur de cette littérature américaine dite de société, sans jamais tomber dans le piège d’une quelconque forme de parodie ou d’outrance.