Littérature étrangère

Sherko Fatah

Otages

Chronique de Sarah Gastel

Librairie Terre des livres (Lyon)

Fini l’actualité dramatique à distance par écran interposé. Imaginez que vous êtes kidnappé loin de vos proches : qu’est-ce qui vous donne la force de tenir ?

Dans les déserts secs et poussiéreux d’Irak, vastes espaces hostiles, où aucune règle ne s’applique, deux hommes sont enlevés : Albert est un archéologue allemand venu « faire le bien », qui fuit son passé ; Osama, son interprète, un ancien pilleur de tombes. Des caves sombres et exiguës aux camionnettes à l’haleine brûlante, ils sont brimbalés dans un labyrinthe de dunes, réceptacle d’une absence d’échappatoire. Les interrogatoires et les brimades pleuvent, l’attente et le doute les ravagent. Pour ne pas devenir fou, tout conserver, se souvenir et gratter la mémoire pour trouver du sens, désespérément. Et se raconter à l’autre. Seulement, de son regard lucide, Sherko Fatah met en question la possibilité de faire dialoguer deux êtres au destin commun mais à l’histoire inconciliable. Après le captivant Voleur de Bagdad (Métailié), roman d’aventures dévoilant les liens du Moyen-Orient et de l’Allemagne pendant la Seconde Guerre mondiale, l’auteur nous plonge de façon troublante, diaboliquement immersive, dans l’enfer de la captivité, interroge le poids de la vie humaine et excelle à rendre compte de la difficulté des hommes à se comprendre.

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