Essais

Catherine Coquery-Vidrovitch

Les Routes de l’esclavage

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Chronique de Sarah Gastel

Librairie Terre des livres (Lyon)

Alors que nous venons de célébrer la « Journée nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions » paraît un essai passionnant et pédagogique sur l’histoire des traites africaines qui nous concernent tous.

L’esclavage n’a pas commencé dans les champs de coton en Amérique. Il remonte à la nuit des temps. C’est l’histoire d’un monde où la violence, la domination et le profit ont dessiné leurs itinéraires, d’un processus complexe et criminel sur lequel s’est construit notre monde, et l’Occident en particulier. C’est le propos de l’ouvrage Les Routes de l’esclavage de Catherine Coquery-Vidrovitch, spécialiste de l’Afrique, qui retrace la géographie des traites des esclaves noirs destinés à quitter le continent africain. Après avoir posé quelques fondamentaux (sources, chiffres), rectifié certaines fausses évidences (notamment sur l’esclavage domestique) et justifié l’emploi du néologisme « être esclavisé » car l’on n’est point esclave par nature, l’historienne retrace chronologiquement les différents acteurs de ces échanges. L’Afrique elle-même dans les sociétés anciennes d’avant l’Islam avec la traite interne, qui s’intensifie au XVe siècle, et la traite transsaharienne avec la domination arabe en Afrique subsaharienne. L’Europe avec l’expansion portugaise et la traite atlantique dès le XVIIe siècle, dont les plantations de cannes à sucre américaines, envahissant les Caraïbes, constitue l’expression la plus féroce. Le XIXe siècle, indissociable des plantations cotonnières, cristallisera aussi les premières luttes pour l’abolition de l’esclavage. La loi passera en 1848 en France. Décisif dans l’histoire du racisme anti-noirs qui perdure de nos jours, l’esclavage survit encore dans de nombreuses régions du Proche et du Moyen-Orient et aussi en Afrique. Il y aurait quarante millions de victimes dans le monde actuellement. En novembre dernier, les images terribles de ventes de migrants africains sur les marchés aux esclaves en Libye nous le rappelaient tristement.

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