Littérature française

Laurent Seksik

La Légende des fils

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photo libraire

Chronique de

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Arizona, 1962. Dans l’Amérique bouillonnante de Kennedy, Scott vit son adolescence entre une mère aimante et protectrice, et un père haineux, rentré de la guerre de Corée dévasté. Comment grandir dans un pays qui souffle le chaud et le froid ?

Dans la chambre de Scott Hatford, 14 ans, un poster de J.F.K qu’il admire. Dans sa tête, un million d’envies, d’idées et de rêves pour l’avenir. Mais à 14 ans, à l’heure des premiers flirts, au beau milieu de ce que l’on peine à nommer les ruines d’une famille, il n’a d’autre choix que de vivre ses journées au rythme des retrouvailles à l’aube, en secret, avec sa mère infirmière de nuit, et des altercations avec son père, Jeffrey Hatford, ancien combattant de la guerre de Corée qui porte en lui toute l’amertume de la violence, concentrée en une haine profonde. Scott fait ce qu’il peut pour protéger sa mère, mais à son âge, il ne peut qu’essuyer les coups, subir lui aussi les rafales d’injures et se taire. Au soir d’une énième dispute d’une extrême violence, Mam décide qu’il est temps de fuir cet homme qu’elle a pourtant tellement aimé, et d’essayer de nouveau de sauver la vie de son fils. Car si toutes les tentatives précédentes ont échoué, elle est convaincue que celle-ci sera la bonne, et que Jeffrey ne les retrouvera pas. Au moment où la voiture file sur l’autoroute qui doit les mener à Denver, alors que sa mère fredonne une chanson d’Elvis, Scott se prend à rêver d’un avenir meilleur, à une vie enfin légère et sereine aux côtés de sa mère. Au centre d’une parabole reflétant l’Amérique des années 1960, autant enviable que détestable, Laurent Seksik place les fluctuations de l’espoir et du désespoir, qui sont aussi celles de tout un peuple entraîné dans la guerre. Il renvoie admirablement la relation père-fils à l’Histoire même du pays. Scott admire en Kennedy la figure du père présent et aimant, qu’il ne peut s’empêcher de comparer avec son propre père. Pourtant, il ne comprend pas les choix qu’il fait pour son pays. Il déteste son père pour la violence de ses actes, tout en ne pouvant s’empêcher d’aimer et d’admirer en lui le courage d’un homme qui a, un jour, eu foi en sa patrie.


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