Littérature étrangère

Marcel Theroux

Au nord du monde

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Chronique de Marianne Kmiecik

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Formidable roman d'anticipation, dystopie haletante, western mené de main de maître, Au nord du monde est tout cela à la fois et bien plus encore ! Un texte salué notamment par l’écrivain japonais Haruki Murakami, auteur d’une postface à l’ouvrage. Un petit bijou des belles éditions Zulma !

Makepeace vit seule dans une ville abandonnée du Grand Nord. Ses parents y avaient élu domicile des années plus tôt afin d’échapper aux villes tentaculaires et de renouer avec une existence simple et proche de la terre. Mais les guerres, les famines et les cataclysmes les ont rattrapés et Makepeace s'est retrouvée seule. Bousculée par la vie, profondément meurtrie, c’est au plus sombre du désespoir qu’elle entraperçoit une lueur d’espoir, une lueur de vie : un avion qui survole la région. Symbole d’un ailleurs possible, d’une vie différente, cet avion est pour Makepeace un déclic. Elle décide alors de prendre la route pour voir ce que cet ailleurs pourrait bien lui réserver. C'est le début pour elle d'un voyage dont elle ne sortira pas indemne, semé d'embûches, de violence et de dangers. De la petite ville à la population sous le joug d’un prédicateur à la colonne d’esclaves enchaînés marchant péniblement vers un travail rude et exténuant dans une ferme, Makepeace devra redoubler de ruse et de courage pour échapper à l’oppression et recouvrer sa liberté. Son expérience dans « la Zone », où d’étranges objets doivent être récupérés, sera déterminante pour son destin. Fils de l’écrivain-voyageur Paul Theroux, Marcel Theroux nous livre ici son premier roman. Documentariste, il a notamment beaucoup voyagé en Russie, dans le Nord de la Sibérie, et s’est également rendu aux confins de l’Arctique, en avion et en traîneau. Inspiré de ces voyages, Au nord du monde a aussi été imaginé par l’auteur après un séjour en Ukraine, réalisé en 2020. Lors de ce voyage, Marcel Theroux a rencontré Galina, une femme qui vivait avec sa mère dans la zone d’exclusion de trente kilomètres autour de Tchernobyl. Elle y vivait en travaillant dans une ferme de la zone, chargée d’observer les effets de la radioactivité sur les animaux et les récoltes. Les paysages observés et les rencontres effectuées lors de ces voyages ont donné matière à l’écrivain. Le réchauffement climatique est également au cœur des préoccupations du documentariste qui a enquêté sur notre dépendance aux énergies fossiles et sur l’énergie nucléaire. « Et je me suis mis à voyager dans un monde où l’existence de Galina était un aperçu, non plus du passé de mes ancêtres, mais de l’avenir de mes enfants. Et c’est ainsi que ce livre a commencé. » Et quel livre ! Un immense roman incarné par son incroyable héroïne, une femme a laquelle on s’attache dès les premiers instants de lecture pour ne plus la lâcher !

 

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