Littérature étrangère

Tommy Orange

Ici n’est plus ici

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Chronique de Marianne Kmiecik

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Grand roman choral sur la nation indienne urbaine, Ici n’est plus ici évoque avec une justesse et une puissance narrative impressionnantes la situation des Amérindiens d’Oakland. Poignant !

Quelle force ! Quelle puissance ! Il se dégage de ce roman choral une vraie voix, un talent littéraire incontournable ! Tommy Orange, qui appartient à la tribu des Cheyennes, a travaillé pendant dix ans dans un centre communautaire amérindien. De cette expérience, des rencontres qu’il a faites là-bas et de son propre parcours, l’écrivain tire Ici n’est plus ici. Il nous présente une douzaine de personnages, des Amérindiens d’aujourd’hui qui vivent en ville, à Oakland. C’était une volonté réelle, pour Tommy Orange, de s’éloigner de la représentation traditionnelle du peuple indien, en lien avec la nature que l’on croise souvent au cinéma ou en littérature. Les personnages de ce roman sont des Indiens urbains, chacun heurté par la vie et par les difficultés propres à une communauté qui a été décimée et qui souffre aujourd’hui encore de racisme, d’obstacles pour accéder à l’emploi, ce qui entraîne pauvreté, problèmes familiaux, d’alcool ou de drogue. Si chaque chapitre pourrait de prime abord s’apparenter à une nouvelle, on comprend petit à petit que toutes les histoires sont liées, se croisent et semblent converger vers un même événement : un pow-wow, comme un retour aux sources, une célébration d’une culture mise à mal. Mais la violence et la destruction s’invitent partout. Roman ambitieux, véritable révélation littéraire aux États-Unis et en traduction dans une vingtaine de langues, Ici n’est plus ici (Macadam Indian en version originale) est un texte à la fois poétique et profondément rageur ! On ne peut s’empêcher de penser à Sherman Alexie, Louise Erdrich, Joseph Boyden ou encore David Treuer, autant d’influences que Tommy Orange revendique et dont il se fait le digne héritier !

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