Polar

Niko Tackian

La Lisière

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Chronique de Nathalie Iris

Librairie Mots en marge (La Garenne-Colombes)

La Lisière est un polar qui vous embarque dès les premières pages dans une « enquête de l’Ouest » où il est question de disparitions, de légendes bretonnes, de marins-pêcheurs et de limites entre deux mondes. Niko Tackian a un grand talent pour nous parler de cette très belle région des Monts d’Arrée où il n’est pas toujours facile de vivre !

Qu’est-ce qui vous a donné envie d’écrire une intrigue qui se passe dans les Monts d’Arrée ?

Niko Tackian - D’abord il y a eu un magnifique album photo sur lequel je suis tombé par hasard. J’ai d’abord cru qu’il s’agissait de l’Écosse avant de comprendre que c’était les Monts d’Arrée. Ensuite, j’ai découvert la riche histoire de la région. Depuis toujours, ce petit bout de Finistère est une terre âpre où les conditions de vie sont plus difficiles qu’ailleurs. Il s’y est développé un vrai goût pour la résistance, la contestation et la résilience. Je suis allé sur place et j’ai immédiatement ressenti l’ambiance particulière de ces immenses tourbières, de ces forêts inextricables, de ce lac où se profile la silhouette éteinte d’une centrale nucléaire. Il y règne une atmosphère envoûtante, avec ses églises sur les frontons desquels on croise l’Ankou, ses chapelles perdues sur des monts, ses chaos granitiques sous lesquels se cachent des rivières souterraines… Bref, c’est une terre de légende parfaite pour un romancier.

 

Pouvez-vous expliciter le titre choisi pour ce roman ?

N. T. - J’avais envie d’un titre qui laisse l’imagination du lecteur travailler. La lisière, c’est la limite entre deux mondes. Et dans ce roman, vous allez naviguer entre rêve et réalité car une partie de l’intrigue se déroule dans ces contrées oniriques où nous passons la moitié de nos vies. Mais c’est également la limite entre la vie et la mort. Or, dès le premier chapitre, le lecteur est plongé dans un récit où les enjeux sont clairement définis : Vivian a perdu sa famille. Va-t-elle la retrouver ?

 

Pourquoi avoir choisi une femme pour mener l’enquête ? Vous êtes-vous inspiré d’un personnage réel ?

N. T. - Je voulais un roman dont les personnages principaux soient un trio de femmes. Vivian, la victime, Maëlys, la gendarme,  et Éva, la psy. Car La Lisière est pour moi un roman à la sensibilité particulièrement féminine par son côté organique. Perdre un enfant est un événement viscéral et j’avais envie que ce soit des femmes qui mènent ce combat pour la vérité, aussi bien dans l’enquête policière que dans les méandres du psychisme. Ensuite, Maëlys est en charge d’une unité de gendarmerie à Carhaix et il se trouve qu’à l’époque pendant laquelle j’écrivais ce roman, il y avait bien une femme en poste et à cet endroit.

 

Vous évoquez aussi la dure vie des marins-pêcheurs. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?

N. T. - J’essaie d’être juste avec ce métier extrêmement difficile, souvent maltraité par les médias. Quand on s’y intéresse, on se rend compte qu’au-delà des difficultés financières liées à la condition de « patron pêcheur », c’est surtout une activité dangereuse et nécessitant un immense professionnalisme. C’est également une sorte de profession de foi. Je me suis intéressé au destin de ces hommes de la mer : ils embarquent parfois très tôt, tout juste adolescents. C’est souvent une vocation que de prendre la mer.

 

Parmi les personnages qui m’ont touchée, il y a celui de Ronan. Comment le décririez-vous, en quelques mots ?

N. T. - C’est un gamin maudit, condamné à suivre les pas d’un père maltraitant dans ses pires travers. C’est aussi un homme de la mer qui se retrouve dans les Monts d’Arrée, territoire profondément terrestre. Il y a une lutte dans ce personnage, pour la survie de son âme, pour la résilience. Ronan m’a également permis de parler de l’univers de la drogue en milieu maritime et de dénoncer pas mal de clichés.

 

Qu’est-ce qui vous paraît le plus déterminant à travailler dans l’écriture d’un polar ?

N. T. - Beaucoup de choses ! La sincérité d’abord. Sans elle, aucune chance de tenir la route pendant des mois d’écriture et d’avoir un bon roman. La précision ensuite. Le polar est un genre du réel. On se doit à nos lecteurs d’être bien documentés, de ne rien laisser au hasard. Ensuite, c’est le rythme : gérer la tension, le suspense, les rebondissements. Savoir tisser des intrigues, les mêler comme autant de fils du destin de nos personnages. On assimile souvent le polar à un sous-genre de la littérature, pourtant, à mon sens, c’est justement un genre très précis nécessitant de la sensibilité et une excellente boîte à outils de raconteur d’histoires.

 

Le nouveau roman de Niko Tackian a pour décor les Monts d’Arrée en Bretagne. Alors qu’un homme roule avec sa femme Vivian et son fils pré-adolescent un vendredi soir pour aller chez sa mère, une forme étrange déboule sur la route. L’homme s’arrête, le fils descend et tout à coup les deux disparaissent. L’épouse terrifiée se précipite au commissariat, raconte son histoire à la gendarme Maëlys qui va commencer à enquêter. Le problème est que Vivian est persuadée que tout cela n’est qu’un cauchemar : elle a l’impression de vivre une vie parallèle dans laquelle son mari et son fils sont bien vivants. Avec l’aide de Maëlys et d’une psychologue, les trois femmes vont peu à peu démêler toute l’histoire.

 

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