Jeunesse

Ceri Roberts

Les Réfugiés et les Migrants

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Chronique de Gaëlle Farre

Librairie Maupetit (Marseille)

La crise des migrants occupe une grande place dans les médias, notamment depuis le conflit syrien en cours depuis 2011. Mais les raisons pour lesquelles des personnes deviennent des réfugiés et des migrants sont multiples et le monde entier est concerné. Comment en parler aux plus jeunes ? Grâce à la littérature jeunesse.

Des parutions ont déjà fait date dans ce domaine. On peut citer l’ouvrage collectif Eux, c’est nous, dont le texte est signé par Daniel Pennac, le documentaire Planète migrants (Sophie Lamoureux, Actes Sud Junior) ou bien encore l’album Partir (Francesca Sanna, Gallimard Jeunesse). Les titres qui suivent enrichissent avec à-propos cette courte sélection. Rentrons dans le vif du sujet avec Les Réfugiés et les Migrants, publié au sein d’une nouvelle collection chez Nathan, « Explique-moi… », qui compte aussi l’album La Pauvreté et la Faim. Celle-ci se propose d’aborder les grands thèmes d’actualité et de les rendre accessibles aux enfants dès 6 ans. On commence par différencier les réfugiés des migrants avant d’évoquer les raisons – économiques, politiques ou climatiques –, qui poussent les gens à partir de chez eux. Leurs conditions de voyage sont également abordées ainsi que l’organisation de leur nouvelle vie. De nombreuses situations sont données en exemple de manière concise, et illustrées de manière à placer l’enfant au plus près de ce qui se passe. Mais l’enfant n’est pas seulement spectateur, il est invité également à la réflexion et à l’action. L’action. C’est ce qui est au cœur de Et j’irai loin, bien loin. Et si, à l’instar du héros, Ernest, nous trouvions des réfugiés dans notre maison, que ferions-nous ? C’est l’excellente question qui s’impose très vite à la lecture du nouveau roman de Christophe Léon. Ernest a 14 ans et en a assez de vivre tous les ans les mêmes vacances, au même endroit, dans le Nord de la France avec ses parents. Cet été-là, à peine arrivé dans la maison de vacances, Ernest découvre une jeune fille, Arezu, au regard hypnotique. D’origine afghane, elle s’est réfugiée avec son père malade dans la maison le temps de reprendre des forces. Voilà des mois qu’ils cheminent à travers l’Europe à destination de l’Angleterre. Amaigris et éprouvés, ils n’ont cependant rien perdu de leur détermination et vont trouver en la famille d’Ernest une solidarité qui leur était jusque-là inconnue. Ernest va quant à lui voir ses parents sous un nouveau jour. Si le quotidien les avait quelque peu mis en sommeil au fil des ans, ils se montrent engagés comme jamais auparavant face à Arezu et son père. Ils n’hésitent pas une seconde à payer des soins médicaux à Mehran, le père, et bientôt à organiser leur passage en Angleterre. Ainsi, Et j’irai loin, bien loin ne parle pas seulement – et avec talent – d’un sujet d’actualité, c’est aussi un roman familial qui invite à agir, à aider. Grâce à Arezu et Mehran, les parents d’Ernest reprennent possession de leurs vies et leur relation avec Ernest s’en trouve grandie. Pour finir, place à un album émouvant et tout en subtilités, Le Refuge (Cambourakis). Au fil des pages, Géraldine Alibeu réunit des enfants et un passant, un oiseau et une dame portant l’ombrelle, dans le refuge de Richard. Chacun va apporter sa touche et faire grandir le petit coin que s’est aménagé l’enfant ce jour-là. Mais pourquoi ont-ils tous le besoin de se réfugier ? Les raisons ne sont pas seulement catastrophiques ou climatiques. On peut tous avoir besoin d’un abri et ce, que l’on soit petit ou grand, et de n’importe quel continent. Richard a le sourire à la fin, il a construit un « refuge pour tous » et Géraldine Alibeu appelle à l’altruisme grâce à ce héros singulier. Voilà des références très différentes les unes des autres qui affichent toutes les trois un beau point commun : leur découverte tend à faire du lecteur un citoyen du monde !

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