Jeunesse

Jean-Michel Billioud

Le Capitaine au long cours

illustration

Chronique de Gaëlle Farre

Librairie Maupetit (Marseille)

Que l’on soit sur la plage, au creux de la vague ou au fond des océans, la mer est une scène extraordinaire où se jouent mille événements. Elle est le théâtre d’émotions et de retrouvailles, de jeux et de découvertes. Elle permet aussi de s’évader. L’appel est irrésistible, partons voguer !

C’est au large que le voyage commence ! Cet homme-là a sillonné toutes les mers qui existent. Et il vogue encore, inlassablement, de jour comme de nuit, tout au long de l’année. C’est avec fierté qu’il arbore son costume de capitaine sur son long-courrier. Voguer, c’est comme respirer pour cet homme. Jusqu’au jour où un tout petit être resté à terre vient à lui manquer. Il se nomme Joseph, c’est son petit garçon. Le bateau du capitaine change vite de cap. Direction, la terre ferme ! Père et fils se retrouvent et partent tous deux au large. Ce papa exerce un métier solitaire, un métier passion mais il sait mettre sa fonction professionnelle de côté quand son métier de papa se rappelle à lui. Dans Le Capitaine au long cours, Jean-Michel Billioud dit tout l’amour d’un papa pour son enfant de manière sobre et infiniment touchante. « Il retrouva Joseph et le serra dans ses grands bras. Longuement. Très longuement. » Pauline Martin contribue elle aussi à faire fondre le cœur de ses lecteurs avec ses illustrations tout en rondeurs que l’on aime tant. Nous allons maintenant faire escale dans quelques ports bien choisis. Ports autour du monde permet de faire le tour du monde tout en découvrant la diversité des ports. Il y a les ports de commerce (Hambourg par exemple), de pêche (Cantabrie) et de plaisance (comme Saint-Tropez) ; il y a aussi les ports urbains, les ports fluviaux et les ports de mer. De New York à la Côte d’Azur, en passant par Hambourg ou le fleuve Congo, on compte seize escales et autant d’ambiances différentes. Les textes de Mia Cassany sont riches d’anecdotes étonnantes. Un jeu de « cherche et trouve » enrichit le livre et c’est un plaisir que de scruter les illustrations délicieusement vintage de Victor Medina à la recherche des détails nommés. Après cela, si on partait plonger ? Il y a, dans Cachés dans la mer, un peu plus de vingt animaux marins – parmi lesquels une coquette rascasse, un poisson siffleur et un crabe arlequin ; un couple d’hippocampes amoureux et aussi un gourmand poisson-perroquet. Ils se sont dissimulés dans dix décors différents et la mission du lecteur est de les retrouver. Cachés dans la mer est un livre-jeu pétillant où l’on s’amuse à chercher et retrouver des animaux aux couleurs lumineuses au sein de dix doubles pages parfaitement somptueuses. Et c’est une réussite ! L’immersion est totale et l’envie de plonger « en vrai » dans les profondeurs océanes est grande après une telle lecture ! On va s’attarder dans les fonds marins et faire la connaissance du Grand Poulpe. Il a huit bras et autant de fonctions différentes pour chacun : le premier pour se sustenter, le deuxième pour câliner et les deux suivants pour trouver le meilleur emplacement où se tenir. Le cinquième assure la défense de l’animal et le sixième se charge de la décoration de l’intérieur tandis que le septième est expert en danse de salon. Et le huitième ? Le huitième trouve une fin tragique lors d’un combat avec une murène et « sans lui, le Grand Poulpe se sent triste et bancal ». Au fil du temps, ce huitième bras se transformera mais restera toujours très court et un peu tordu. Il n’empêchera pas le Poulpe d’être heureux et de construire avec les siens un beau quotidien. « Il sert à montrer qu’on peut réparer les malheurs. » Angélique Villeneuve dit avec beaucoup de finesse la difficulté de se sentir diminué et différent. Les illustrations à la gouache d’Anaïs Brunet magnifient les fonds marins et donnent à cette histoire un caractère majestueux, c’est très beau ! Filons vers la plage maintenant. C’est là que Carl et Elsa vont passer la journée ! « Le sable est blanc et de petites vagues étincelantes clapotent sur le rivage. » Le décor est posé, pelles et bouées dauphins n’ont qu’à bien se tenir car la journée sera animée ! Les enfants s’occupent en creusant un trou puis avec la construction d’un château de pirates mais une pieuvre casse l’ambiance. Elle provoque une blessure à l’œil de Carl puis Elsa se plaint d’une morsure de coquillage, aïe ! Heureusement, le phoque est là pour les consoler. Quand soudain, quelque chose se trouve dans le trou, qu’est-ce qui s’est fait prendre ? Un lion des sables ? Elsa sera quelque peu déçue de découvrir que non, mais cette journée qui a pris un air de robinsonnade se terminera sous les meilleurs auspices. Cette nouvelle aventure des irrésistibles Carl et Elsa met à l’honneur le jeu et l’imagination, deux activités pour lesquelles les enfants sont assurément doués ! Pour se remettre de toutes ces aventures marines, c’est par une séance de contes que nous terminerons ! Pour son livre L’Homme qui voulut peindre la mer, Tristan Koëgel a sillonné la Méditerranée et ramené des récits riches en mystères. « La mer, il l’aime pour de vrai. Il ne sait pas vraiment pourquoi, mais il l’aime. » De Marseille à Cadaquès en passant par la rade de Raguse, la langue de l’auteur nous envoûte et ses récits rappellent ceux de Poe ou de Maupassant, c’est un beau moment de littérature qu’il nous offre !

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