Essais

Pierre Bayard

Aurais-je été résistant ou bourreau ?

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Chronique de Christine Lechapt

Librairie Maison du livre (Rodez)

Résistant ou bourreau ? Quel aurait été votre camp durant la Seconde Guerre mondiale ? C’est l’abyssale question à laquelle tente de répondre Pierre Bayard, sans faux-semblants ni angélisme. Éléments de réponse.

Aurais-je été résistant ou bourreau ? Il va sans dire que cette question existentielle a déjà taraudé nombre d’entre nous, et chacun aimerait croire qu’il se serait rangé dans le bon camp. Mais il est évident que la réponse ne va pas de soi et que nous manquons d’éléments pour pouvoir y répondre. En se replaçant dans le contexte où il aurait pu se trouver en étant né, comme son père, en janvier 1922, Pierre Bayard examine les choix auxquels il aurait été confronté en pareilles circonstances. Il s’interroge tout d’abord sur notre « personnalité potentielle », autrement dit, cette partie de nous qui ne se dévoile que dans des circonstances exceptionnelles. Ensuite, il détermine quels peuvent être les conflits éthiques entrant en jeu dans ce genre de situation extrême, et les facteurs aptes à provoquer une « bifurcation » dans notre attitude. Mais il ausculte également les freins qui nous empêchent d’agir, telle la peur ; et le contexte social, le milieu culturel, ce qu’il appelle notre manque de « créativité », même si nous éprouvons des sentiments très forts d’empathie envers les victimes. N’imaginez pas pour autant qu’aux vues de ces réflexions, Pierre Bayard se laisse aller à jouer le beau rôle. Bien au contraire. Et même s’il en vient finalement à se dire qu’il aurait sans doute rejoint la Résistance, il constate que sa prise de conscience se serait manifestée tardivement, du fait de son tempérament autant que de son milieu familial. La grande qualité du livre de Pierre Bayard est de fournir à son lecteur les éléments indispensables au cheminement de sa réflexion et de son questionnement. Et ces éléments ne se résument pas à un lourd appareillage théorique, puisqu’ils puisent abondamment dans la littérature, le cinéma, l’Histoire, ainsi que dans quelques éclairantes expériences scientifiques. Et en fin de compte, ce que met d’abord en relief , c’est l’extraordinaire sens moral et la force de conviction dont étaient animés ceux qui, en 1940, décidèrent de résister à la peste nazie.Aurais-je été résistant ou bourreau ?

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