Essais

Denis Kambouchner

L’École, question philosophique

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Chronique de Christine Lechapt

Librairie Maison du livre (Rodez)

Les gouvernements de tous horizons politiques se succèdent et certains sujets de société comme l’école, le travail ou la prison continuent de nourrir les débats sans qu’aucune solution acceptable ne se profile. Trois auteurs ont planché sur ces questions et apportent des pistes de réflexion.

Échec scolaire, faible niveau d’enseignement, nombre de professeurs insuffisant et programmes inadaptés. L’école n’en finit pas de défrayer la chronique, entraînant malentendus, pertes d’énergie, voire rejets. Ce qui manque au débat sur l’école, pour Denis Kambouchner, c’est une réponse philosophique capable de dire ce qui doit être enseigné et surtout ce qui doit être évalué. Dans un premier temps, il analyse les enjeux d’un débat sur l’école : la situation actuelle, les questions cruciales à se poser et les principes fondateurs de l’école en tant qu’institution. Puis il s’appuie sur les thèses de philosophes de renom comme Rousseau, Diderot ou Durkheim pour étayer son propos. Cette analyse magistrale, loin de tout jargon pour spécialistes, pose des bases solides pour une réflexion d’ensemble sur l’école et permet enfin de faire avancer le débat. Dans nos sociétés, l’évaluation ne se limite pas seulement au système scolaire, elle fait également partie intégrante de notre vie professionnelle. Depuis bientôt trente ans, le monde du travail est régi par ce dispositif. Doit-on s’en satisfaire ? Ça n’est pas ce qui ressort de l’ouvrage de Bénédicte Vidaillet. Il apparaît en effet que ces évaluations ont des effets pervers (stress croissant conduisant, dans certains cas extrêmes, jusqu’au suicide), mais également contre-productifs (compétition violente au sein des équipes, volonté d’atteindre les objectifs en négligeant totalement le reste du travail). Face aux critiques, ce système s’est radouci jusqu’à devenir atone. Alors pourquoi continuer dans ce sens ? Tout simplement parce que nous l’appelons de nos vœux, parce que nous avons besoin de savoir où est notre place au sein de notre entreprise et parce que nous souhaitons voir notre travail récompensé. C’est le paradoxe que dévoile Bénédicte Vidaillet et qui fait de cet ouvrage une brillante réflexion sur un système qui n’a plus lieu d’être. Lorsque l’on parle de la prison, c’est souvent pour évoquer le problème de la surpopulation carcérale. Cette réalité ne laisse aucun doute et nécessite de s’interroger sur les politiques à mettre en œuvre pour résoudre une grave insulte à la dignité humaine. Bien loin des propos utopistes des abolitionnistes, Pierre-Victor Tournier considère la prison comme une nécessité pour la République. Son analyse consiste principalement à analyser la situation présente. En effet, toutes les peines privatives de liberté ne se valent pas, puisqu’elles vont de mesures à minima nécessaires à l’exercice de la justice (la garde à vue), à des peines de prison ferme faisant suite à un jugement. Malgré le manque de données fiables, l’auteur s’interroge sur la place que la peine de prison représente parmi l’arsenal des sanctions, sa durée, à qui elle s’adresse et si elle est adaptée. Une brillante réflexion qui démêle admirablement les rouages de cet important sujet de société.

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