Jeunesse

Marie Pavlenko

Un si petit oiseau

illustration

Chronique de Isabelle Réty

Librairie Gwalarn (Lannion)

Après le touchant Je suis ton soleil (Flammarion jeunesse), Marie Pavlenko revient en librairie, en cette rentrée d’hiver, pour offrir aux adolescents un joli et délicat roman sur le handicap, qui vous fera passer sans pathos du rire aux larmes et des larmes au rire, sans transition, mais avec beaucoup de subtilité.

Une soirée du mois de mai parfaite : l’air est doux, le printemps est là dans toute sa douceur. Abigail, Abi pour les intimes, est en voiture avec sa mère. « Accoudée à la portière, elle dessinait des vagues avec sa main, doigts tendus et serrés face au vent, elle était un dauphin, sautait hors de l’eau, replongeait dans des gerbes d’écume blanche. » Et puis le choc, des cris, l’incompréhension en voyant le sang et sa main qui pendouille, comme détachée du reste du bras. Après des mois d’hôpital et de rééducation, Abigail rentre à la maison et doit réapprendre à vivre. Mais comment reprendre une vie normale avec un bras en moins ? Chaque geste du quotidien doit être pensé, réfléchi. Depuis toute petite, Abigail voulait devenir vétérinaire, elle avait travaillé dur pour intégrer une classe préparatoire à la prochaine rentrée. Ce rêve s’est envolé. Abigail a coupé les ponts avec ses amis d’avant. Elle ne veut pas lire la pitié dans leurs regards, ne veut pas exposer son moignon, qu’elle surnomme rognon. Il y a aussi la douleur, les médicaments. Abigail accepte cependant des promenades au parc avec sa mère. Une mère présente, attentive, à l’écoute, qui fait tout pour que sa fille ne sombre pas. C’est là qu’elle va rencontrer Aurèle, un copain de primaire complètement perdu de vue. Lorsqu’il voit la main en silicone, Aurèle arrête de sourire, comme les autres. Abigail ne souhaite pas de nouvelles amitiés et se renferme sur elle-même mais Aurèle, un passionné d’ornithologie, qui lui aussi doit gérer une vie compliquée, va peu à peu s’imposer de manière subtile dans la vie de la jeune fille. Marie Pavlenko aborde le thème du handicap avec sensibilité et délicatesse, et glisse beaucoup d’humour dans son texte. Le spécialiste des blagues pourries dans la famille, c’est le père d’Abi, qui amène de la légèreté, dans une ambiance familiale un peu plombée, même si, quand il regarde sa fille, son cœur se serre et ses larmes ne sont jamais loin. C’est sa façon à lui de l’aider à garder la tête hors de l’eau. Tout tourne autour d’Abigail et sa petite sœur Millie n’en peut plus. Elle voudrait qu’on s’intéresse un peu plus à elle et aimerait vivre normalement sa vie d’adolescente de quinze ans. Et puis, il y a Coline, la tante un peu fantasque qui soutient sa nièce et la pousse à reprendre goût à la vie. Tout dans ce roman sonne juste : les colères, les incompréhensions, les interrogations, les larmes, les rires, les moments de découragement, de doute et puis d’espoir.

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