Essais

Pierre Bayard

La Vérité sur Dix Petits Nègres

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Chronique de Aurélie Janssens

Librairie Page et Plume (Limoges)

Pourquoi les auteurs seraient-ils les seuls à détenir la vérité sur les romans qu’ils ont écrits ? Pierre Bayard continue son travail d’enquêteur littéraire avec un monument de « mystère en chambre close ».

Quatrième volet d’une série commencée avec Qui a tué Roger Ackroyd ?, Enquête sur Hamlet et L’Affaire du chien des Baskerville, Pierre Bayard n’en a pas fini avec Agatha Christie. Il faut dire que la Reine du crime fut assez prolixe – plus d’une soixantaine de romans et 150 nouvelles –, ce qui fait une quantité impressionnante de meurtres, de victimes et donc de coupables. Mais a-t-elle toujours su être suffisamment perspicace pour démasquer le coupable de ses romans ? N’y a-t-il pas eu quelques failles dans son raisonnement, le déroulement des faits ? Et si, comme dans un spectacle de prestidigitation, notre regard n’avait pas été un temps captif, détourné, biaisé, de telle sorte que le véritable criminel ait pu agir en toute impunité ? C’est ce que tend à démontrer Pierre Bayard dans cet essai. Il se glisse pour cela dans la peau de celui (ou celle) qu’il considère être le véritable assassin des Dix Petits Nègres, avide de vouloir rétablir la vérité sur le déroulement des faits et de ses motivations. Mais avant de nous dévoiler son identité, il (elle) démontre comment Agatha Christie elle-même a pu se tromper, quels sont les mécanismes littéraires, psychologiques qui ont pu l’amener à une fausse conclusion. Il (elle) résume tout d’abord l’enquête menée par l’auteur pour mieux en démontrer les failles, l’invraisemblance, s’étonne même que des milliers de lecteurs s’en soient contentés, aient pu saluer la maestria de cette conclusion sans la remettre en question. Pourtant, selon lui (elle), la clé de l’énigme se trouve sous leurs yeux, bien en évidence, mais des mécanismes d’aveuglement nous empêchent de la voir. Pierre Bayard nous offre une nouvelle contre-enquête littéraire brillante et jubilatoire, désacralisant un monument pour mieux en démont(r)er les mécanismes et nous amener de manière ludique à réfléchir sur la littérature.

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