Littérature étrangère

Richard Yates

Un destin d’exception

illustration
photo libraire

Chronique de Aurélie Paschal

Pigiste ()

Robert Laffont publie l’un des romans les plus autobiographiques de Richard Yates, paru aux États-Unis en 1969. Le talent de l’auteur à peindre par touches subtiles les failles de ses personnages se déploie une nouvelle fois.

1944. Robert Prentice n’a que 18 ans lorsqu’il s’engage dans l’armée américaine. Il s’apprête à rejoindre l’Europe pour servir son pays et libérer le vieux continent de l’horreur hitlérienne. Cet engagement lui permet de se dégager de l’étouffement maternel. En effet, sa mère Alice est un personnage complexe et terriblement néfaste pour son fils. Divorcée, elle n’a plus que lui. Il a dû supporter ses angoisses et sa vie décousue. Alice a une ambition démesurée et est persuadée qu’elle pourra vivre un destin d’exception. Elle tente pourtant de se dépêtrer de relations amoureuses peu fructueuses avec des hommes sans intérêt. Mais son ambition demeure toujours intacte, quelles que soient ses déconvenues sentimentales. Pour le plus grand désespoir de son fils qui est obligé de subir cette vie décousue. En s’engageant, Robert veut prouver à tous qu’il n’est pas condamné à rester dans les jupons de sa mère. Il est également devenu un homme, un vrai, un soldat. Il devra d’abord trouver sa place au sein de sa garnison de rattachement, puis dans la société. Lui aussi cherche à se forger un destin d’exception. Malheureusement, les vies de Robert et Alice seront riches en désillusions, un thème cher à Richard Yates. Deux êtres rattrapés par leurs échecs. Mais n’est-il pas vrai que tout le monde a droit à une seconde chance ? Robert et Alice auront-ils accès à cette nouvelle chance ? À travers le personnage de Robert, Richard Yates relate son expérience de soldat durant la Seconde Guerre mondiale. Il aime à dresser le portrait d’êtres empreints de désillusion. Les failles des hommes constituent le principal moteur créatif de son œuvre. Une seule question se pose : pourquoi avoir privé si longtemps le lectorat français du magnifique roman de ce grand auteur américain ?

Les autres chroniques du libraire