Littérature étrangère

Jesmyn Ward

Bois sauvage

photo libraire

Chronique de Géraldine Huchet

Pigiste ()

Régulièrement, un roman américain signé par un illustre inconnu et auréolé de prestigieux prix littéraires débarque sur les tables des libraires. Bois Sauvage est de cette eau.

Et pour une fois, c’est amplement mérité ! Cette chronique rude et émouvante d’une famille déshéritée du Mississippi, rapportée par l’unique fille de la famille, Esch, 14 ans, qui se découvre enceinte de l’adolescent qu’elle aime mais qui la rejette, emporte tout sur son passage. On pourrait craindre le misérabilisme à la lecture des premières pages – mère morte en couches, père alcoolique, frère obsédé par sa chienne et les combats qu’elle livre contre d’autres pitbulls… –, et pourtant c’est plutôt une force de vie, même violente, qui vous étreint à la lecture du roman. C’est que l’action, comme dans les plus belles tragédies grecques, est ramassée sur quelques jours, ce qui donne une concision et une force de frappe incroyables au récit. Pas un mot de trop, dialogues au scalpel, actions décrites avec une économie de moyens maximale : se protéger, barricader sa maison car un ouragan arrive. Oui, mais cet ouragan n’est pas n’importe lequel, c’est Katrina. Dès que les éléments se déchaînent, Bois Sauvage prend des allures de mythe et convoque Médée dévorant ses enfants.

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