Littérature étrangère

Alice Kaplan

Maison Atlas

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Chronique de Marie-Ève Charbonnier

Librairie Paroles (Saint-Mandé)

Histoire d’amour, quête des origines, roman du monde en général, de l’Algérie en particulier : tels sont les arcs narratifs principaux de ce roman, le premier de l’écrivaine américaine Alice Kaplan.

Emily (originaire du Minnesota) et Daniel (originaire d'Alger) se rencontrent pendant leurs études à Bordeaux. Ils se racontent, interrogent leurs judéités respectives (si différentes dans leur expression), tombent amoureux. Leur histoire est intense mais courte, brisée par le retour de Daniel à Alger auprès de ses parents, pendant les événements de la guerre civile des années 1990. La jeune Becca (dont on découvrira au fil du roman l’identité) fera plusieurs années après le voyage à Alger pour comprendre d'où elle vient. Emily, Daniel, Becca : les récits s’entrecroisent sur des temporalités différentes pour construire le destin de cette famille, les Atlas, et d’un pays, l’Algérie. Car au centre du récit se dresse Daniel Atlas, son retour précipité à Alger et sa volonté de protéger sa famille alors qu’une guerre fratricide engendre le chaos. L’histoire de sa famille se déploie pour brosser le portrait des juifs algériens et leur rapport à la France, leur quête d’identité. Celle de Becca, plusieurs années après, s’inscrit ainsi dans une interrogation de longue date. Procédant par petites touches, mêlant le récit intime et celui de l’histoire de l’Algérie dans ce qu’elle a de plus douloureux, Alice Kaplan sait trouver les mots justes, les silences nécessaires, pour raconter l’histoire d’un pays, d’une communauté dans un pays, les interrogations sur l’appartenance, sur la religion. Ce faisant, elle montre par l’exemple qu’une fois de plus, le roman est une des plus belles manières de montrer et faire ressentir la réalité du monde. Et par conséquent, que le choix du nom de cette maison d’édition est en parfaite résonnance avec un de ses premiers titres : témoigner de son bruit et s’en faire l’écho.