Littérature étrangère

Karla Suarez

La Havane année zéro

illustration
photo libraire

Chronique de Betty Trouillet

()

Antonio Meucci, grand inventeur italien, arrive à la Havane en 1835, où il travaille au théâtre Tacon. En 1849, en soignant des patients atteints de rhumatismes avec des chocs électriques, il découvre le télégraphe parlant.

Karla SuÁrez, ingénieur en informatique vivant à Lisbonne mais née à La Havane, signe ici son troisième roman après Tropique des silences et La Voyageuse . Fascinée par l’histoire de Meucci – contemporain de Garibaldi – et son invention du téléphone, Karla Suárez nous transporte à Cuba en 1993 avec ce nouveau roman. C’est l’année d’après-guerre et La Havane est laissée à l’abandon. C’est l’année des coupures d’électricité interminables, des garde-manger vides, des embarcations de fortune essayant de quitter cet enfer. Pas de transports, la ville est paralysée, à pied ou à vélo, les Havanais organisent leurs vies tant bien que mal. Peu d’espoir, alors chaque habitant s’accroche au moindre détail ou projet intéressant pour survivre. Julia, professeur de mathématiques dans un lycée technologique, rêve d’un grand appartement et de grandes découvertes scientifiques. Euclides, son directeur de thèse et son ancien amant, dépressif depuis son divorce, lui parle d’un document original qui prouverait l’invention du téléphone par Meucci avant celle de Graham Bell. Julia se lance dans une incroyable aventure. Elle rencontre un ange blond aux cheveux longs possédant un bel appartement en plein centre de la ville. Très vite, ils tombent amoureux. Son enquête la mène jusqu’à Léonardo, un écrivain qui rêve de faire un roman sur l’histoire de Meucci, mais qui passe la plupart de son temps à boire du rhum et à parler plutôt qu’à écrire. Tous ces personnages liés à ce fameux document veulent à tout prix mettre la main dessus. Peu à peu, Julia s’aperçoit que ces trois hommes lui mentent. Pourquoi ? Mais qui possède ce précieux papier ? Petit à petit, elle essaie de démêler le vrai du faux et reconstitue ainsi le puzzle comme une énigme mathématique. Karla Suárez dresse le portrait d’une Havane troublante en cette année de disette, ravagée par le désespoir. Avec ses personnages énigmatiques et ses hypothèses historiques, elle nous tient en haleine avec cette enquête pleine de rebondissements.

Les autres chroniques du libraire