Littérature étrangère

Roberto Ampuero

Quand nous étions révolutionnaires

illustration

Chronique de Jean-Baptiste Hamelin

Librairie Le Carnet à spirales (Charlieu)

Lorsque l’esprit de la révolution s’égare dans La Havane corrompue, apeurée et affamée, sous la plume nostalgique d’un homme au vécu impressionnant, alors s’offre au lecteur un formidable documentaire de l’Histoire récente.

Le titre original de cette incroyable chronique, Nuestros años verde olivo, fait référence à l’uniforme des révolutionnaires cubains. Cet uniforme était porté par les fidèles de Fidel, uniforme de tout un peuple, quand les infidèles, au peloton d’exécution, étaient fusillés. Un jeune étudiant chilien fuit son pays natal dès le renversement d’Allende et la mise en place d’une dictature bestiale. Membre des unités des jeunes socialistes, il fuit alors en Allemagne de l’Est pour y étudier le marxisme-léninisme à l’université de Leipzig. Il découvre le quotidien grisâtre d’une république démocratique qui s’étiole bien loin de la modernité et de la vivacité de sa sœur de l’Ouest. Notre jeune étudiant tombera amoureux d’une jeune Cubaine aux chaudes couleurs : Margarita. Ce voyage aux îles du plaisir et du soleil sera de courte durée quand, brutalement, il apprendra que le père de sa jeune amante n’est autre que Cienfuegos, procureur de la République cubaine, proche et indéfectible soutien de Castro, procureur aux mains ensanglantées et au cœur, à Fidel, dévoué. Perdre Margarita ou se marier, telle devient l’alternative du Chilien. Désormais, le lecteur que je suis se tait et vous laisse découvrir avec voracité ce texte d’une ampleur fascinante, décrivant avec précision la vie sous Fidel, dans une île bercée de soleil. Me resteront en mémoire ces incroyables pages sur le rationnement, sur la dévastation de tout ce qui rappelle l’aisance passée, cette survie, la peur chevillée au corps où chaque geste, chaque parole est interprété. Roberto Ampuero tire les enseignements de cette période avec humour parfois, mais surtout avec une sincère affection pour ces jeunes naïfs et pour leurs idées neuves et belles, sous le joug de la bestialité humaine. Un très grand roman !

Les autres chroniques du libraire