Littérature étrangère

Arnon Grunberg

Notre oncle

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photo libraire

Chronique de Roxanne Moreil

Librairie L'Oiseau tempête (Saint-Nazaire)

Le 13 octobre, les éditions Héloïse d’Ormesson publient Notre Oncle, grand texte d’Arnon Grunberg qui, dans cette saga délirante, flirte avec le roman d’anticipation et plonge le lecteur au cœur de ses pires cauchemars.

Le décor de cet ambitieux roman est un régime totalitaire en guerre. L’histoire commence par une bavure. Chargé d’arrêter un couple d’opposants au régime, le major Anthony laisse la situation lui échapper. Les suspects sont abattus par les jeunes militaires incompétents qui forment son équipe, presque sous les yeux de la petite-fille du couple, Lina. Le major voit toutefois, à travers cet enfant, un moyen de reprendre le contrôle de son existence. Stérile, il est incapable de réaliser le rêve de maternité de son épouse Paloma. Loin d’imaginer que celle-ci pourrait refuser d’adopter la fillette, il la recueille chez lui et se voit déjà chef d’une famille recomposée mais heureuse. Peu à peu cependant, sa vie tourne au cauchemar. Le lieutenant-colonel, qui entretient une liaison avec la femme du major, l’envoie sur une mission suicide qui mènera ce dernier, pourtant fervent défenseur de la dictature, devant le tribunal populaire pour ses erreurs militaires. Pendant ce temps, la petite Lina, livrée à elle-même, ignore la mort de ses parents et part à leur recherche, avant de tomber à nouveau entre les mains de mystérieux ravisseurs… Arnon Grunberg, auteur néerlandais considéré comme un surdoué depuis le succès de son premier roman, Lundis bleus , signe ici une saga délirante et désespérée, où la naïveté d’un homme le conduit à prendre des décisions absurdes qui le mèneront à la déchéance. Dans cet univers où l’espoir n’est plus permis et où les hommes s’affaissent sous le poids de la morale, les personnages sont cruels et inquiétants, prêts à tout pour servir leurs propres intérêts. L’auteur nous fait passer du rire jaune au profond malaise, et on comprend vite qu’à travers ces personnages inhumains, ce qu’il décrit, c’est nous-mêmes !