Littérature étrangère
Alan Hollinghurst
Nos soirées

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Alan Hollinghurst
Nos soirées
Traduit de l'anglais par David Fauquemberg
Albin Michel
20/08/2025
606 pages, 24,90 €
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Chronique de
Stanislas Rigot
Librairie Lamartine (Paris) -
❤ Lu et conseillé par
9 libraire(s)
- Isabelle Aurousseau-Couriol de de Paris (Saint-Étienne)
- Linda Pommereul de Le Failler (Rennes)
- Audrey Andriot de Jonas (Paris)
- Marie Mannevy de La Boîte de Pandore (Lons-le-Saunier)
- Tracy Pradalier de Germaine Tillion (Paris)
- Loris Mouge de Chantelivre (Paris)
- Marie-Line Musset de Lettres Infuses - Formations pour bibliothèques (Rueil-Malmaison)
- Pierre-Alexis Nail de Petites Histoires entre amis (Chennevières-sur-Marne)
- Eva Auger de Les Folies d'encres (Le Raincy)

✒ Stanislas Rigot
(Librairie Lamartine, Paris)
Dave, un acteur de théâtre vieillissant, revient sur sa vie, nous plongeant dans l’Angleterre de l’après Seconde Guerre mondiale. Roman d’apprentissage dans la grande tradition anglaise, servi par une langue d’une rare élégance, Nos soirées est le plus émouvant des romans d’Alan Hollinghurst.
Mark Hadlon vient de mourir. Cet homme a été, des années durant, un mécène, offrant notamment des bourses d’études à des enfants défavorisés pour leur permettre d’accéder à des cursus scolaires prestigieux. Dave, fils unique d’une mère célibataire, a pu en profiter il y a des années et cette bourse a changé le cours de sa vie. L’annonce de ce décès va le renvoyer à son enfance, à sa rencontre avec cette puissante famille, à son parcours qui ne sera finalement pas celui escompté par son entourage et qui l’amènera à sa découverte du théâtre et à sa vocation d’acteur – il jouit à l’entame de l’histoire d’une belle renommée même si les affres du temps commencent à se faire sentir. Et nous voici embarqués pour un grand voyage dans l’espace et le temps au cœur de cette Angleterre des années 1960 avec ses glorieuses grandes écoles et sa verte campagne qui semblait éternelle jusqu’au Londres éteint de la pandémie. Un voyage en compagnie de personnages mémorables, à l’instar de sa mère, une couturière à la grande beauté, toute en retenue et discrétion, qui aurait connu un amour fou en Birmanie, ou de Giles, le fils des Hadlon, affreux garnement qui prendra bientôt la direction de la politique et du populisme, bien loin des valeurs de ses parents. Le récit sera tour à tour intime (l’identité sexuelle du jeune homme qui se façonne, son rapport au monde et la place qu’il y prend), sociétal et historique avec ce pays en proie aux changements parfois brusques de l’après-guerre. Alan Hollinghurst est un auteur aussi majeur que rare. Il a reçu le Booker Prize en 2004 avec La Ligne de beauté, le prix du meilleur livre étranger en 2013 pour L’Enfant de l’étranger. Son dernier livre, L’Affaire Sparsholt remonte à 2017 et ce nouveau roman est peut-être son plus beau livre. En effet, Nos soirées émeut très souvent au plus haut point, déployant une riche palette d’émotions, le rire ici, les larmes là, ce qui en fait une formidable porte d’entrée dans l’œuvre de cet auteur, inlassable conteur d’un pays et de ses habitants, ces voisins si proches et si lointains à la fois. Pour autant, l’auteur ne sacrifie pas son impressionnante architecture - cette maestria à laquelle nous a habitués un des plus grands auteurs anglais vivants - qui associe à des scènes où sont décortiqués avec une grande minutie et une rare finesse les différents personnages et les enjeux, un redoutable sens de l’ellipse où, d’une partie à l’autre, peuvent s’abîmer des années entières, laissant le soin à son lecteur de retracer les lignes.