Littérature étrangère

Eric McCormack

Le Nuage d’obsidienne

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photo libraire

Chronique de Michel Edo

Librairie Lucioles (Vienne)

Avec Eric McCormack tout se joue dans les premières pages. Un homme surpris par un orage au Mexique se réfugie dans une librairie. Dans un livre il tombe sur le nom d’un village écossais qui ne lui est pas inconnu. L’histoire peut commencer.

Harry, le héros, est un personnage typique du roman de formation. Né littéralement dans le ruisseau d’un faubourg misérable d’une cité industrielle, mais heureusement entouré de parents aimants, son quotidien est fait de violence, de meurtres horribles et de désespoir. Il est plutôt curieux et avide de savoir, ce qui le protège de la médiocrité et le sauve des écueils de sa condition. Il perdra malheureusement père et mère peu de temps avant ses examens de fin d’études dans l’explosion d’une énorme bombe allemande, oubliée là par des autorités qui n’ont pas jugé utile d’évacuer le quartier avant de tenter de la désamorcer. Bref, Harry se retrouve amputé de ses racines et prêt à accepter n’importe quel poste, n’importe où. Le hasard l’amènera à Duncairn, ville minière d’Écosse, où il aura le bonheur de rencontrer Myriam, une jeune femme dont il tombe immédiatement fou amoureux. Amour qui le hantera bien après qu’elle l’ait éconduit, et, à vrai dire, tout au long de son aventureuse existence. C’est un cœur de poète, doublé d’un pragmatique, un curieux qui accepte la beauté et l’indicible comme étant également remarquables. Je ne vous narrerai pas par le détail la suite de sa vie. D’une Afrique contemporaine que Conrad n’aurait pas reniée, au Canada, en passant par les mines d’or d’Amérique du Sud, Harry est confronté à des mystères qu’aucune science, aucune psychanalyse ne sont totalement en mesure d’expliquer. Nulle recension ne peut rendre justice à ce formidable roman d’aventures, où se mêlent à la fois la quête la plus dérisoire qu’un homme puisse mener et les conséquences existentielles les plus fondamentales qui en découlent. McCormack met en permanence son lecteur en déséquilibre, en éveil donc, en lui suggérant des images qu’il croit connaître, en suscitant chez lui un sentiment de stabilité quand, justement, tout est mouvant, susceptible de basculer vers quelque chose d’inconnu. Bref, vertigineux !

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