Jeunesse

Jean-Claude Mourlevat

Les Trois Caramels capitaux

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photo libraire

Chronique de Gwendal Oulés

Librairie Récréalivres (Le Mans)

La collection « Petite poche » des éditions Thierry Magnier change de look. C’est l’occasion parfaite pour remettre l’accent sur une collection qui, depuis le début du xxie siècle, a révolutionné les codes des premières lectures en dehors de tout formatage, tout en gardant le cap d’une belle exigence littéraire.

Avec 120 titres à son catalogue et une belle réputation auprès des prescripteurs du livre, les « Petite poche » font le pari d’un plus grand public tout en conservant ce qui a fait leur marque de fabrique. Le petit format, la typographie aérée, le calibrage spécifique de quarante-huit pages sont toujours au rendez-vous. Entre la nouvelle charte graphique des couvertures joliment pointillistes, l’appareil pédagogique adapté aux enseignants (autour d’un site dédié) et le nouveau papier, tout concourt à réaffirmer la qualité et la singularité de cette collection au sein d’une production qui s’est beaucoup développée ces dix dernières années. Ce grand ménage de printemps s’accompagne évidemment, en marge des rééditions de circonstance, de la publication de cinq nouveaux titres par la crème du catalogue : Jean-Claude Mourlevat, Marie-Sabine Roger, Mikaël Ollivier, Mathis, Susie Morgenstern. De son côté, Jean-Claude Mourlevat signe une nouvelle fable fantastique savoureuse, accompagnant notamment la réédition de son fameux grand succès L’Homme à l’oreille coupée (plus de 31 000 exemplaires vendus). Les Trois Caramels capitaux nous invitent avec humour à envisager la trivialité des critères d’accès au paradis. Le vétilleux saint Pierre à la mémoire infaillible donnera du fil à retordre à notre coupable héros. Marie-Sabine Roger propose elle aussi, avec Le Terrible Effaceur une fable philosophique intemporelle. Son conte, qui se lit comme une défense de la liberté d’expression, met en scène le combat entre une enfant rebelle avec le tyran qui donne son titre au roman. Mathis quant à lui croque avec tendresse l’été désœuvré de Pierre et Jean qui, suite à une malheureuse panne, se retrouvent privés de télévision. La Gelée d’été est une ode aux plaisirs simples comme celui de préparer de la gelée de mûres après la cueillette. L’auteur restitue malicieusement le matérialisme naïf de ces enfants contraints de nettoyer les « toiles d’araignées sur les cadres et les roues de leurs VTT ». Susie Morgenstern explore avec un ton qui n’appartient qu’à elle la question du dialogue au travers du personnage de Theodora, déterminée à résoudre ses problèmes, mais seulement après en avoir compris le sens. Pas de problème ! est résolument positif, plein de cette puissance de conviction que peuvent avoir les enfants. Avec Trop fort, Victor !, Mikaël Ollivier signe un de ses textes les plus forts. Il inscrit là un roman sans effets, d’une justesse surprenante, dans notre société contemporaine troublée. Le jeune Victor y raconte son quotidien perturbé par l’actualité d’une prise d’otages dans un collège par des terroristes. L’auteur met en scène face à l’enfant une mère seule qui tient bon sur ses principes (pas de télé ni de portable à la maison)… pour nous cueillir au final avec un sens très sûr de la dramaturgie. C’est notamment parce que des textes comme celui-ci rencontrent leurs lecteurs que les « Petite poche » sont indispensables.

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