Dans une langue rugueuse lorsqu’elle creuse l’enfance et ronde à hauteur d’homme, le portrait d’une vie se dessine. Victime d’un père violent, l’enfant devenu père, sachant ses jours comptés, ne vit plus que pour transmettre à son aîné, sa gamine, son petit et leur mère l’amour qu’il leur voue. Il s’amuse au présent pour défier sa mort annoncée. Au cœur d’une demeure saturée de livres, près du piano et des jouets ou sur le banc que domine un haut tilleul, dans les bois alentours, il leur parle, leur écrit. Il joue avec ce temps qui lui reste, se fait appeler pépé, pour se sentir vieillissant. Il leur fait don, avec une délicieuse fantaisie, de sa certitude que l’audace et l’infinie douceur sont les socles des vies libres qui savent chanter. Ses souvenirs tranchants et leur révélation ne ternissent pas l'ardeur de son inventivité ni sa tendresse. Certaines plumes ont la politesse du désespoir et la mélancolie joyeuse.