Littérature française

Dany Laferrière

Un certain art de vivre

Chronique de Nicolas Mouton

Librairie Le Presse papier (Argenteuil)

Raymond Queneau disait qu’il n’y avait en littérature que deux familles : celle de L’Iliade et celle de L’Odyssée. À n’en pas douter, c’est à cette dernière qu’Un certain art de vivre appartient. Isolé dans un petit hôtel de Bornéo, dans la seule compagnie de Valéry Larbaud, Dany Laferrière remonte un long fleuve d’encre, celui qu’il trace depuis bientôt quarante ans, pour en trouver la « raison ». La déraison, nous l’apprenons dès le début, c’est le départ d’Hoki (Eroshima) et la douleur qui en découle. Adepte de la position horizontale, lascive et de l’eau chaude de la baignoire, réconfortante comme un ventre de mère, il se recentre sur les formes brèves. Et c’est un enchantement. Par leur rigueur, leur concision extrême, l’expérience qu’ils portent, ces « fragments » touchent à la poésie (non rimée mais comptée) et dialoguent avec d’autres poètes. Ce chant d’amour est un portrait né de la gouache des mots. Tout homme perdu garde son Ithaque.

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