Essais

Erik Orsenna

La Vie, la mort, la vie

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photo libraire

Chronique de Cyril Canon

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À force d’arpenter les rues et les boulevards qui portent son nom, Pasteur est un peu devenu une image d’épinal figée. érik Orsenna, avec tout son talent de conteur, ressuscite l’homme et dépoussière le mythe.

C’est depuis son siège de la coupole, place qu’occupait en son temps le grand savant, que l’académicien a eu l’idée de son nouveau livre. Son voisin était François Jacob, prix Nobel de médecine, et celui-ci, affligé par sa totale ignorance en biologie, lui suggéra de se plonger dans la vie de Pasteur pour « apprendre un peu ». Orsenna, éternel curieux, ne se le fit pas dire deux fois. À sa suite nous allons parcourir la vie de Pasteur et, à travers lui, découvrir la fabuleuse aventure de la recherche scientifique. Par de courts chapitres, vifs et enlevés, l’auteur nous raconte les mécanismes de la vie, celui des microbes, la magie de la fermentation et, bien sûr, le long combat qu’il fallut mener pour découvrir le vaccin contre la rage. Surtout, il dessine le portrait d’un homme inflexible, acharné de travail, qui voua son existence à la science pour faire progresser la vie. Un homme qui eut le malheur de perdre trois de ses filles, emportées par la maladie mais qui jamais ne rompit avec ses recherches. Cette volonté féroce lui permit de faire des découvertes majeures pour éradiquer de nombreuses infections. Orsenna nous le décrit sérieux, grave, hygiéniste implacable évitant les contacts tactiles et note, non sans malice, que si Pasteur fut sans humour et ne riait jamais, c’est probablement parce que le rire est contagieux. Un texte énergique que l’on ne peut lâcher, emporté que nous sommes par son rythme trépidant. De la lutte contre les épidémies qui tuaient les vers à soie, les poules ou les vaches, à la création de l’Institut Pasteur, l’aventure de ce savant qui allait révolutionner le xixe siècle et marquer à jamais la science de son empreinte, est aussi une formidable leçon sur la vie et sa complexité.