Littérature étrangère

Florence Knapp

Les Prénoms

✒ Salomé Fauvel

(Librairie Nouvelle Librairie Baume, Montélimar)

Et si un prénom décidait du cours d’une vie ? Florence Knapp imagine trois destins possibles pour un même enfant, dans un premier roman vibrant sur la famille, la transmission et le poids des choix qui nous échappent.

Cora doit choisir un prénom pour son bébé. Son mari, médecin respecté mais violent à la maison, veut l’appeler Gordon, comme son père avant lui. Une tradition plus lourde à porter qu’il ne l’imagine. Cora hésite : et si donner ce nom revenait à condamner son enfant à lui ressembler ? Elle préfère Julian qui signifie « Ciel père ». Leur fille de 9 ans propose Bear : un prénom à la fois doux et courageux. Trois prénoms, trois vies possibles. C’est le point de départ et la force de ce premier roman qui tisse trois trajectoires parallèles ‒ Gordon, Julian, Bear ‒ où chaque prénom façonne non seulement le destin de l’enfant mais aussi celui de toute la famille. Avec ce procédé à la fois simple et vertigineux, le livre explore la violence intime, la transmission et la possibilité d’échapper à l’héritage. L’écriture est précise et d’une grande justesse émotionnelle. Sans effets, sans pathos, elle laisse parler les silences et les gestes du quotidien. On passe d’un prénom à l’autre comme on traverse un rêve parallèle : chaque version éclaire les autres, chaque existence laisse une trace. La lecture est fluide, habitée : on s’attache à toutes ces vies, on voudrait les poursuivre. Mais ce livre ne se contente pas d’émouvoir. Il pousse à réfléchir, à observer combien un détail, un mot, un choix apparemment anodin peut orienter tout un destin. Le prénom devient une porte : celle de la liberté, de la peur ou de la reconstruction. On referme le livre bouleversé, plein de tendresse pour ces vies fragiles et tenaces. Roman d’une beauté rare, Les Prénoms est à la fois intime et universel, d’une maîtrise narrative impressionnante. Un livre profondément romanesque, dont on sort à la fois ému et fasciné. Impossible de le lâcher : il nous tient comme une histoire qu’on a l’impression de vivre soi-même !

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