Littérature française

Jean-Louis Fournier

La Servante du seigneur

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photo libraire

Chronique de Martine Clesse

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« J’ai égaré ma fille. Je suis retourné à l’endroit où je l’avais laissée, elle n’y était plus... Je l’ai retrouvée. Je l’ai à peine reconnue… Je me demande si c’est vraiment elle. »

Elle était belle, intelligente et drôle, attentionnée avec ses deux grands frères handicapés, dévouée auprès de son père lorsqu’il a perdu sa compagne. La complicité entre Jean-Louis Fournier et sa fille s’est éteinte lorsqu’elle a rencontré, il y a une dizaine d’années, un philosophe, « Monseigneur » comme le nomme si bien l’auteur. C’est pour elle une révélation, pour son père une souffrance de chaque instant. Maniant habilement un humour corrosif, jouant avec les mots, jonglant entre le « tu » – quand il évoque le passé – et le « elle » – lorsqu’il parle du présent –, l’auteur écrit un livre de souvenirs au long duquel il convoque les bons moments passés en compagnie de sa fille, en même temps qu’il se laisse aller à un long questionnement : « Elle est entrée en religion, mais laquelle ? » Il se serait réjoui de la voir entrer en religion, mais elle n’a pas choisi cette voie. Elle vit sous l’emprise de Monseigneur. Elle est devenue terne, sévère, autoritaire et désagréable. Son univers est silence et secret, les sentiments n’y ont plus de place. L’aurait-il perdue définitivement ? Il ne peut s’y résoudre. Et malgré cette nostalgie ancrée en lui, l’espérance de la retrouver est toujours intacte. Mais le temps presse…