Littérature française

Pauline Peyrade

L'Âge de détruire

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photo libraire

Chronique de Clara Liparelli

Librairie du Channel (Calais)

Avec L’Âge de détruire, Pauline Peyrade signe un premier roman choc qui décortique, l’air de rien, la spirale implacable de la violence qui lie une mère et sa fille. Un texte d’une rare noirceur qui nous laisse le souffle coupé.

Elsa a 7 ans et n’a toujours connu que sa mère. On plonge dans leur quotidien lorsque celle-ci fait l’acquisition d’un appartement. Ce nouveau cocon, gorgé de promesses, devient très vite leur prison à toutes les deux et le théâtre d’une sombre descente aux enfers. Les cartons s’entassent, les objets ne trouvent pas leur place et les murs se resserrent chaque jour un peu plus sur la jeune narratrice. Dans ce récit, tout est étouffant. Les jours se succèdent et les nuits aussi, cauchemars sans fin qui convoquent tour à tour démonstrations d’amour désespérées d’une mère à l’agonie et scènes d’une violence physique et sexuelle inouïe. Elsa peine à respirer, coincée entre les murs inhospitaliers de son appartement et ceux de la cour de récréation. Elle y fait un jour la rencontre d’Issa, une camarade de classe qui éveille en elle des sensations nouvelles, la possibilité d’une lumière et un désir de puissance assez déroutant pour une enfant de son âge. Mais la violence est partout et Elsa l’opprimée devient à son tour l’oppresseuse, victime malgré elle de ce cycle infernal, héritière condamnée d’un fardeau familial qui coule dans ses veines. Quand plus tard, Elsa revient dans l’appartement de son enfance et ouvre les placards pour faire le tri dans ses affaires de petite fille, c’est toute l’horreur enfouie des années durant qui lui saute au visage. Ce premier roman est un uppercut. Pauline Peyrade nous donne à voir une relation mère-fille incestueuse et destructrice où l’amour maternel s’efface sous le poids de la terreur. C’est l’histoire d’une enfance impossible à vivre et impossible à quitter. D’une lutte de chaque instant pour tenter de s’extraire de l’inexorable, de refuser la fatalité de l’éternel retour. De la destruction.