Littérature française

Caroline de Mulder

La Pouponnière d'Himmler

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photo libraire

Chronique de Nicolas Ferreira

Librairie D'un livre à l'autre (Avranches)

C’est à une plongée dans un pan plutôt méconnu de la Seconde Guerre mondiale que nous invite Caroline de Mulder dans son roman La Pouponnière d’Himmler, au cœur de la folie de l’idéologie nazie.

Cette histoire est celle du programme « Lebensborn », voulu par Himmler, chef de la SS, pour donner à l’Allemagne une race aryenne au sang pur. Cette folie eugéniste s’est concrétisée par une quarantaine de foyers, appelés Heim, a touché 20 000 enfants nés de mères allemandes et étrangères mais aussi 200 000 enfants enlevés et germanisés de force. Ici, nous sommes dans le Heim de Hochland, en Bavière, créé en 1936 et considéré comme le foyer modèle par Himmler lui-même. Nous découvrons la vie et l’organisation de ce Heim par la voix de trois personnages aux destinées différentes : Helga, jeune infirmière chargée de veiller sur ces femmes enceintes et ces nourrissons ; Renée, jeune Française abandonnée par sa famille qui, après une courte relation, se retrouve enceinte d’un jeune SS, et Marek, prisonnier politique polonais, auparavant interné à Dachau mais maintenant chargé, avec d’autres prisonniers, d’entretenir le Heim. Le personnage d’Helga, central, représente à lui seul la « banalité du mal ». Cette infirmière dévouée à sa tâche, supervisée par un docteur dont elle admire les compétences, voit finalement un monde s’ouvrir à elle, un monde du mal absolu dont elle prend peu à peu conscience car « il n’y a pas d’un côté le bien, de l’autre le mal, il y a de longues glissades dont on ne se relève pas, et des passages quelquefois imperceptibles de l’un à l’autre. Quand on s’en rend compte, il est déjà trop tard ». C’est donc toute la qualité du roman, qui n’est pas un roman historique, de raconter si bien la folie du régime nazi, celle du remplacement de soldats qui mouraient à la guerre par une nouvelle génération, une « race pure » et dont la mission incombait aux femmes, nous offrant ainsi le point de vue d’une partie de celles qui devaient être à l’origine de sa résurrection.