Jacky

Le texte s'ouvre sur la trouvaille de jeux vidéo dans un dépôt-vente de l'arrière-pays niçois. Des enfants retrouvent des jeux qui semblent leur avoir appartenu et espèrent alors retrouver la console associée. Ils comprennent très vite que leur père est venu se débarrasser de tous ces objets de leur passé. À travers l'histoire des jeux vidéo, Anthony Passeron raconte comment cet objet transitionnel a été, dans un premier temps, un cadeau exceptionnel qui leur a permis de passer du temps avec leur père et leur oncle. Dans leur village, ils sont les premiers à posséder une console de jeux vidéo et découvrent que leur père, ce boucher qui ne compte pas ses heures, aime passer du temps en leur compagnie et jouer à leurs côtés avec ce nouvel appareil. Ce prétexte de l’évolution de la technologie et des consoles au fil des années est l'occasion de raconter comment la société évolue en regard de ces mouvements qui semblent infimes mais bien réels. Dans ce village, à cette époque, le territoire du réel enferme tout autant que le jeu vidéo. C'est probablement à travers ces moments passés à jouer sur écran qu'Anthony Passeron a appris à aimer les histoires. C'est le lieu, pour lui, de l'imaginaire, du partage et le territoire de l'enfance, cet espace-temps où sa famille se délite et se disperse. Au sein de ce roman, dans lequel il convoque et tente encore une fois de retrouver les disparus et les absents, on croise son oncle Désiré et sa cousine Émilie, fantômes qui hantent les pages, flottent et nous accompagnent. Jacky, prénom emblématique de la figure du beauf, est un hommage à ce père qui a pris le large, celui qui a vu les secrets de famille, la tristesse et la colère l'envahir au point de ne plus pouvoir vivre avec ceux qu'il aimait. La question de ce roman, c'est celle de savoir quel enfant on est lorsque notre père disparaît et à quoi on se raccroche lorsque tout autour semble insensé. En fermant ce livre, on s'interroge alors : quelle sera la prochaine pièce du puzzle familial ?