Les Étoiles errantes

Voici le nouveau roman de Tommy Orange, lui-même descendant d’une tribu cheyenne qui, après Ici n’est plus ici, nous invite à explorer l'histoire de son peuple. Il opère un trait d’union entre passé et présent, faisant débuter son roman dans les années 1920, dans un pensionnat-prison comme il en existait beaucoup alors. Ces tristes lieux avaient pour mission d’effacer par tous les moyens (violence, humiliation, brimades) les racines et traits distinctifs de ses pensionnaires. Véritable assimilation forcée, tout était fait pour « tuer l’indien pour sauver l’homme ». Bien entendu, la première étape passait souvent par l’annihilation de la culture et la volonté de faire table rase des traditions ancestrales. Depuis, le temps a passé et pourtant les effets de cette destruction massive ont impacté les générations suivantes. Nous allons donc croiser la route de personnages toujours à la marge, invisibilisés et ayant le plus souvent de sévères problèmes d’addiction. Le roman peut être lu comme une saga familiale : un arbre généalogique, au début de l’ouvrage, permet de garder facilement en mémoire les liens de parenté des personnages que nous suivons au fil des pages. Après le traumatisme originel, les épreuves s’enchaînent pour des individus perdus ou reproduisant des schémas destructeurs. Il sera ainsi question de Jude et Bird, les patriarches, pour finir avec Orvil et Lony, leurs descendants du XXIe siècle, qui se heurtent à d'autres plafonds de verre. Pourtant, en lisant les lignes de Tommy Orange, il existe peut-être encore un espoir de « retrouver le chemin de la vie », faire revivre et cohabiter une culture indienne au sein d'une nation américaine tourmentée et fragmentée. Dans la lignée de Louise Erdrich, un nouvel auteur s'est levé pour ne rien oublier, en esquissant des personnages singuliers et touchants.