Bande dessinée

Giacomo Nanni

Casanova

illustration

Chronique de Guillaume Boutreux

Librairie M'Lire (Laval)

Le dessinateur italien Giacomo Nanni vient ajouter son nom à la jeune collection « Olivius » avec une remarquable adaptation d’un texte autobiographique d’un autre Giacomo fort célèbre et répondant au nom de Casanova. Une plongée saisissante dans le monde carcéral du XVIIIe siècle. 

À l’instar d’un Alessandro Tota ou d’un Gipi, c’est grâce à la revue Canicola, qui s’est vue primée à Angoulême en 2008 et dont il est un des cofondateurs, que le public français a pu découvrir Giacomo Nanni. Après les bandes dessinées Le Garçon qui cherchait la peur et Chroniquettes parues chez Cornélius, c’est dans la toute nouvelle collection fondée par Cornélius et L’Olivier, justement baptisée « Olivius », que vient de paraître Casanova, Histoire de ma fuite. Dans Le Garçon qui cherchait la peur, le dessinateur italien nous racontait une histoire d’amour torturée inspirée d’un conte de Grimm. En utilisant un graphisme minimaliste basé sur des aplats de rouge et de vert, Giacomo Nanni conférait à son récit une atmosphère étrange, hors du temps. Pour Chroniquettes, au contraire, Nanni ancrait son histoire dans le réel, puisqu’il évoquait sa relation, sur une dizaine d’années, avec son chat. C’était l’occasion d’un brillant exercice de style en noir et blanc grâce auquel il croquait l’attachant animal sous toutes ses coutures. Dans Casanova, Histoire de ma fuite, Giacomo Nanni relate un épisode méconnu de la vie du célèbre libertin – dont il a lui-même fait le récit dans Histoire de ma fuite des prisons de la République de Venise qu’on appelle les plombs. En effet, Casanova fut emprisonné de 1756 à 1757 dans la prison du Palais des Doges pour libertinage, athéisme et obscurantisme. Nanni restitue à merveille le carcan physique et psychique qui oppresse le fameux Vénitien, seul en sa geôle pendant la quasi-totalité de son enfermement. L’emploi astucieux de trames noires contribue parfaitement à reproduire cette atmosphère carcérale pesante. Le malaise est d’autant plus prégnant que la plupart des personnages auxquels est confronté Casanova sont affublés de visages irréels et difformes, très révélateurs de leur monstruosité d’âme, qu’ils soient geôliers ou codétenus. Et lorsque Casanova commence à planifier son évasion, le lecteur tremble avec lui à l’idée que les préparatifs ne soient découverts. Le chemin vers la liberté s’avère fort étroit et tout faux-pas conduit à une mort certaine. Mais, malgré ces écueils, Casanova va briller par sa ruse et sa patience. Bref, Casanova, Histoire de ma fuite est une magnifique adaptation du texte de Casanova. Giacomo Nanni a su trouver le souffle nécessaire tout en employant les propres mots du malheureux prisonnier. Encore une bonne raison de suivre les parutions d’« Olivius ».