Essais

Gérard Depardieu

Monstre

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photo libraire

Chronique de Louise Debove

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Il est si facile de catégoriser les méchants dans les contes de fées. « Dire “Je t’aime” », « Compter les étoiles », voilà les chapitres du Monstre de Depardieu. Et l’on va découvrir que dans le poitrail de la bête palpite un cœur empli de douceur.

En début d’année, on l’avait suivi en bande dessinée sous le trait de Mathieu Sapin (Dargaud). Tour à tour ogre affamé puis peluche mal aimée, c’était un drôle de portrait qui nous était offert de Depardieu. Qu’on le critique ou qu’on l’admire en tant qu’homme, il est grand temps de se faire cette fois un avis sur la plume de l’acteur. Sous forme de courtes sections, oscillant entre autobiographie et aphorismes, Depardieu se fait ici philosophe. Il brosse des thèmes et des idées qui lui sont chers, savamment illustrés par des exemples, des citations, des comparaisons avec certaines œuvres ou certains auteurs (dont une déclaration d’amour à Zweig). Aucune prétention dans ses mots, juste des vérités qui sont les siennes, un retour sur son enfance dans le Berry, l’aveu de ses erreurs, des conseils que les gens devraient appliquer pour être plus heureux. L’essentiel de la vie ? Être libre et aimer. Rester soi-même. Vivre. « Vivre ce que nous avons à vivre et ne pas nous laisser vivre. » Si l’enthousiasme est là (on peut noter l’hommage aux deux monstres sacrés du cinéma, Truffaut et Ferreri), certains passages sont empreints de mélancolie (on y lit des souvenirs de cinéma, des douleurs de père) ou de colère (contre les Français qui baissent les bras, contre la politique, les informations, les réseaux sociaux, la mondialisation). C’est un homme vrai, authentique, humble, qui écrit. Il aime le cinéma, les rencontres, les plaisirs, les voyages. Il raffole pourtant tout autant de solitude, de silence, de littérature. C’est délicat, juste, pertinent, direct. Ces pages nous aident à découvrir qui se cache derrière l’image. Depardieu, un monstre ? Mais enfin, comme pour tout acteur, c’est un déguisement qu’on lui fait porter !