Bande dessinée

Taiyo Matsumoto

Les Chats du Louvre

illustration

Chronique de Anne-Sophie Rouveloux

()

Le Louvre et la bande dessinée, c’est une belle histoire d’amour ! Cette fois-ci, c’est au tour de Taiyô Matsumoto, auteur des mangas Amer Béton et Sunny (Tonkam et Kana), d’y puiser l’inspiration. Nous découvrons alors qu’à la nuit tombée, de drôles de chats règnent sur le plus célèbre des musées.

Cécile accueille chaque jour les visiteurs du Louvre pour leur faire découvrir les merveilles du musée. Au cours d’une visite, elle croit apercevoir du coin de l’œil un chaton blanc. Ce qu’elle pense être une hallucination est en fait l’un des plus vieux secrets du Louvre. En effet, depuis ses origines, l’édifice abrite dans ses combles une bande de chats ! Seuls les gardiens de nuit sont au courant et Marcel, leur doyen, se charge de les nourrir. Il initie Patrick, la nouvelle recrue, à cette tradition tout en lui posant une question énigmatique : « Tu as déjà entendu la voix d’un tableau ? ». Le vieil homme est hanté par la disparition de sa sœur, survenue lorsqu’ils n’étaient que deux enfants. Selon lui, la jeune Arrietta serait prisonnière d’un tableau. En imaginant des personnages très différents, l’auteur nous donne à voir différentes facettes du Louvre. On le découvre ainsi cosmopolite, comme le préfère Patrick, lorsque des visiteurs du monde entier s’y croisent ou bien alors intime, comme lorsque Cécile narre la grande Histoire des œuvres à un petit comité. Mais lorsque les fameux « chats du Louvre » font leur apparition, le récit bascule dans la fantaisie. À la nuit tombée, lorsque les galeries sont désertes, ces étranges pensionnaires prennent forme humaine et nous assistons à des échanges enflammés entre les dénommés Barbe-Bleue, Bout-de-Bois ou Replet ! Mais le plus étrange de ces félins, c’est Flocon. Chaton blanc le jour, petit garçon le nuit, il a la faculté de passer de tableau en tableau, chose pratique pour échapper à d’éventuels poursuivants ou pour jouer avec un papillon ! En suivant le chaton lors de ses escapades nocturnes, nous réalisons notre rêve le plus fou : avoir ce musée rien que pour nous et évoluer tranquillement dans des salles silencieuses, plongées dans la pénombre. Ici, la frontière entre le réel et le rêve s’atténue. Car les toiles des grands maîtres que nous reconnaissons peuvent se transformer en pièges mortels. Si l’on peut se balader dans une toile, on peut également y rester prisonnier, à l’image de la sœur de Marcel. On raconte même que certains tableaux seraient malfaisants, contaminés par l’âme tourmentée de leur créateur. Mais pour Flocon, le plus grand danger viendra de son clan. Le diabolique félin Dents-de-Scie a juré d’avoir sa peau et la mélancolie qui étreint le chaton sera sa meilleure alliée. Tout à la fois déjanté, mignon ou onirique, cette bande dessinée est aussi le récit d’une formidable aventure humaine, pleine de suspense et d’émotion. Tandis que Marcel trouve en Patrick et Cécile l’aide qu’il a attendue toute sa vie, la jeune guide s’épanouit en mettant son érudition au service de l’enquête que les trois mènent pour retrouver Arrietta. Ce premier tome est un enchantement. Matsumoto a capté l’essence même du Louvre que l’on connaît et que l’on aime tout en y faisant survenir des aventures magiques et captivantes. On trépigne déjà d’impatience à l’idée de découvrir la conclusion de ce fabuleux récit !

Les autres chroniques du libraire