Littérature étrangère

Alain Claude Sulzer

Une mesure de trop

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photo libraire

Chronique de François-Xavier Schmit

Librairie L'autre rive (Toulouse)

Alain Claude Sulzer nous avait déjà agréablement surpris avec Un garçon parfait (Babel, 2012). Une mesure de trop est, quant à lui, un roman choral autour d’un concert donné par un pianiste virtuose, Marek Olsberg, au Philharmonique de Berlin.

Encore une fois, c’est avec grâce, délicatesse et une finesse psychologique formidable qu’Alain Claude Sulzer nous embarque dans cette étude de mœurs. Nous y découvrons, à l’occasion d’un récital nocturne, la vie chaotique d’une dizaine de personnages. Certains se connaissent, d’autres se rencontrent pour la première fois, d’autres encore ne font que se frôler. Personnage central, Marek, prisonnier de son rôle de génie du piano programmé pour jouer sans états d’âme, va s’affranchir de ce costume trop grand de manière inattendue et violente. Cette prise de conscience apparaît dès lors comme un révélateur pour les personnages gravitant autour de lui, qui se confrontent brusquement à la nature véritable de celui qu’ils croyaient connaître par cœur. La vie n’est jamais aussi clairement déterminée qu’on le pense. Une série de réactions en chaîne provoquée par le brusque revirement de Marek cause quantité de dégâts et dommages collatéraux, qui conduiront toutefois chacun des personnages à gagner sa liberté. Esther, l’épouse parfaite surprend les infidélités de son mari. Sophie, la tante alcoolique de Klara, tombe le masque et réapprend à aimer sa nièce. Claudius et Nico, deux amants, voient leur histoire exploser en vol. Bettina, jeune étudiante reconvertie en escort girl, apprend ce soir-là que son client n’est autre que le meilleur ami de son père… Chacun se ment. Mais la soirée qui constitue la trame du roman est l’occasion de remettre les existences de chacun dans le bon sens. Solitude de nos vies urbaines, apparences, hypocrisie d’un monde contemporain violent, ce roman démontre que la liberté est question de volonté et de choix individuels. On s’attache à ces personnages pathétiques et en même temps profondément humains. Ils nous ressemblent.