Essais

Claude Rabant

Jalousie

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photo libraire

Chronique de Florence Zinck

Librairie Sauramps Comédie (Montpellier)

Même si la jalousie est un sentiment éprouvé par un grand nombre de personnes, elle recouvre de multiples facettes, que le psychanalyste Claude Rabant explore dans son dernier essai.

Cette réflexion complète, en quelque sorte, ses études sur le délire, le réel ou la mélancolie. L’auteur trouve son ancrage en faisant référence aux personnages du théâtre tragique, tel le personnage d’Othello de Shakespeare, où envie et jalousie s’entrecroisent entre deux frères d’armes, Iago, qui ne cesse de clamer : « Je ne suis pas ce que je suis », et Cassio, « un grand calculateur ». D’où la question : « est-on ce que l’on paraît ? » Dans la tragédie de Sénèque, Médée est blessée par l’infidélité et cherche à se venger. Avec sa pièce Andromaque, Racine peint un personnage, Oreste, qui est l’incarnation de la jalousie mélancolique. Enfin, dans les textes bibliques, le choix préférentiel de Yahvé pour l’éleveur Abel, déclenche chez le laboureur Caïn un irrépressible désir de vengeance, qui le conduira au meurtre. Pour chacun d’eux, la jalousie s’exprime par la fureur et ses égarements. Ce que résumait Voltaire en son temps : « la jalousie, quand elle est furieuse, produit plus de crimes que l’intérêt et l’ambition. » Cette analyse présente de nombreux autres cas. Par le biais de comédies ou de farces, la figure de Sganarelle ou le personnage du cocu imaginaire de Molière, illustre la dimension presque toujours grotesque du sentiment de jalousie. Par l’évocation des écrits de Georges Bataille, Claude Rabant souligne que la jalousie est une passion de la perte, « une érotisation de la mort et de la perte, en vue de la destruction de l’objet. » En se référant aux écrits freudiens et lacaniens, l’auteur introduit la dimension du surmoi et celle de la sublimation – le délire jaloux étant une sublimation avortée. À travers ses vingt-neuf chapitres, le psychanalyste ne cesse de nous éclairer sur les écueils de la jalousie, nous interpellant avec ces mots : « Si la jalousie veut la gloire, selon quelle loi la vie est-elle la plus glorieuse ? »