Littérature française

Claro

Crash-test

photo libraire

Chronique de Camille Broch

Librairie L'Embarcadère (Saint-Nazaire)

Claro se lance dans un récit (d)étonnant qui joue avec le langage, la géographie des mots sur la page, la typographie, à la manière des contraintes oulipiennes. Une réussite !

On connaît le bonhomme et son syndrome du couteau-suisse : Claro est multifonctions. Auteur, traducteur, blogueur (« Le clavier cannibale » rassemble les chroniques efficaces et poussées de ses lectures), l’individu est hyperactif et c’est tant mieux ! Mais ce n’est apparemment pas suffisant. Crash-test pourrait être une nouvelle corde fixée à son arc déjà bien garni, car l’auteur se lance dans un exercice de style digne d’un Oulipien de classe olympique. Le rythme est si soutenu, les phrases si lapidaires qu’on croirait de l’écriture automatique. Le jeu de l’emplacement des mots – avec de longs espaces pour traduire l’attente ou la disposition du texte évoquant l’assise côté passager d’une voiture formant un siège auto – rappelle la poésie visuelle et les calligrammes. Toutes ces contraintes formelles servent l’intrigue, où l’on s’insère dans le psychisme inquiétant d’un homme chargé de faire passer des crash-tests à des cadavres subtilisés, plus ou moins officiellement, à la morgue. Il arrive de moins en moins à se détacher de la violence de son métier et nous le cueillons au bord de la rupture. Ajoutez une touche de féminisme, vous avez un très bon roman.

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