Littérature étrangère

Ronaldo Wrobel

Traduire Hannah

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photo libraire

Chronique de Catherine Mugnier

Librairie Imaginaire (Annecy)

C’est une nouvelle fois à la lecture d’un superbe roman, passionnant, drôle, émouvant et terriblement envoûtant que nous invitent les éditions Métailié, subtils découvreurs de nouveaux talents sud-américains !

Max Kutner, modeste cordonnier juif polonais, a trouvé refuge au Brésil. Son échoppe se trouve place Onze, près du port de Rio de Janeiro où se sont rassemblés tous les exilés. À 40 ans, son célibat et sa petite vie sans histoires lui conviennent parfaitement. Il a échappé à la famine et sans doute à un danger encore plus grand en fuyant la vieille Europe dans les années 1930. Mais le Brésil vit sous la dictature de Getulio Vargas. Ce despote paranoïaque craint un complot et met en place un système de surveillance et de censure du courrier, ordonnant de faire traduire toutes les lettres échangées en yiddish à travers les différents pays du continent. Bien malgré lui, Max est enrôlé par la police militaire pour cette misérable besogne. Il s’occupe des échanges entre l’Argentine et le Brésil. Ce sont des nouvelles bien banales qui transitent entre ses mains. Il découvre maintes recettes de cuisine et s’amuse de considérations météorologiques, mais nullement de préparation de coup d’État ni de mode d’emploi pour la fabrication d’une bombe ! Honteux et ne pouvant se soustraire à sa tâche, Max se sent de plus en plus mal à l’aise, jusqu’au jour où il découvre la correspondance qu’Hannah entretient avec sa sœur habitant Buenos Aires. Ce sont des missives pleines de bonté et de réflexions sur le genre humain. Maintenant, il n’a plus qu’une obsession : rencontrer cette jeune femme qui ne pourra que l’accepter tel qu’il est. Un heureux hasard fait entrer Hannah dans la boutique de Max. Elle existe donc bel et bien, et ses souliers ont besoin d’une réparation. Mais c’est l’époque trouble de l’avant-guerre et rien n’est simple… Voici un vrai petit bonheur de lecture qui mêle subtilement sagesse juive et exubérance latino-américaine. C’est un premier roman traduit du brésilien. J’espère que l’auteur en a écrit beaucoup d’autres !