Essais

Luisa Damiano , Paul Dumouchel

Vivre avec les robots

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Chronique de Charlène Busalli

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À travers deux nouvelles parutions, un anthropologue d’un côté, deux philosophes de l’autre, partagent le fruit d’une longue réflexion sur notre relation aux êtres artificiels qui peuplent de plus en plus notre quotidien.

Denis Vidal a longuement étudié la manière dont les hommes interagissent avec différents types d’entités artificielles. Ses recherches ont porté sur des sujets aussi divers que la communication entre les hindous et leurs dieux en Himalaya, les statues de cire de Madame Tussauds, l’art d’Antony Gormley, ou encore la robotique humanoïde. Si ces différents domaines d’intérêt peuvent sembler bien éloignés les uns des autres, Aux frontières de l’humain montre qu’ils ont un point commun majeur : la réaction anthropomorphique que suscitent ces divers artefacts chez l’homme. Pour Denis Vidal, il est urgent de mener une réflexion collective sur le « pacte anthropomorphique » qui nous liera aux robots et autres intelligences artificielles à l’avenir. Étudier les interactions que des hommes de différentes cultures ont pu avoir avec des artefacts au fil de l’Histoire peut donc constituer une base sur laquelle construire notre réflexion vis-à-vis de la robotique. Paul Dumouchel et Luisa Damiano s’intéressent quant à eux à la manière dont les robots vont changer notre socialité, tout en donnant l’opportunité de mener « une enquête empirique et expérimentale sur la nature de notre esprit ». Leurs recherches se sont en particulier tournées vers les robots sociaux, à savoir les agents artificiels destinés à devenir des compagnons, notamment pour les personnes vulnérables, comme les enfants autistes ou les personnes âgées. Comme Denis Vidal, les deux chercheurs en appellent à une réflexion globale à la fois philosophique et politique. La création d’une nouvelle discipline, qu’ils nomment « éthique synthétique », permettrait ainsi de donner une direction saine aux relations que nous comptons établir avec nos nouveaux compagnons artificiels, tout en nous apportant une meilleure compréhension de l’esprit humain.

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