Jeunesse

Géraldine Barbe

L’Invité surprise

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photo libraire

Chronique de Aurélia Magalhaes

Bibliothèque/Médiathèque Jean Cocteau (Massy)

Quand on commence à lire seul, il n’est jamais facile de choisir un livre. Il faut oublier l’exercice scolaire et avoir suffisamment confiance en l’objet pour croire qu’il nous apportera le plaisir singulier qu’aucun autre objet ne peut nous procurer. L’humour est une méthode pour apprivoiser un jeune lecteur.

Il n’y pas qu’un certain sorcier qui a révolutionné le monde du livre pour enfants : depuis quelques années, les collections pour apprentis lecteurs se multiplient avec comme objectif de proposer des histoires singulières et bien écrites donnant le goût de lire. Elles sont écrites par de vrais auteurs qui montrent que la littérature n’est ni une affaire d’âge ni de nombre de pages. S’ils ont recours à l’humour, c’est que c’est un biais très efficace pour apprivoiser un lecteur qui ne sait pas encore très bien quels sont ses goûts en matière de livres. Et là encore, question rigolade, il existe plusieurs pistes, comme on peut le voir au travers de ces trois romans. Le Thé des poissons (Piret Raud, coll. « Tic Tac », Le Rouergue Jeunesse) n’est pas sans rappeler l’univers du nonsense cher à Lewis Carroll. On y croise une petite fille qui raconte tellement d’histoires incroyables qu’elle n’aura d’autre solution que d’en écrire une fois devenue grande, un soldat qui à force de prendre au pied de la lettre les ordres de son général se retrouve sur la lune, et même un téléphone peureux… Incroyable, non ? Ce petit recueil de nouvelles illustré permet au jeune lecteur de lire autant d’histoires que son appétit en réclame, dans un sens ou dans un autre, et surtout de se régaler d’un imaginaire délicieusement impertinent, proche de l’enfance et apte à le conduire tout en douceur vers la lecture. Question imaginaire, Ouf, petit homme des cavernes n’est pas en reste. Parce qu’il n’ose pas avouer qu’il a quitté sa tribu, Ouf raconte qu’il l’a perdue suite à l’éternuement d’un mammouth. Mais la vie d’un petit homme solitaire n’est ni amusante ni de tout repos. Il faut échapper aux prédateurs et se satisfaire de sa seule compagnie. Heureusement, Ouf rencontre Zou, une fille dégourdie qui sait faire de la musique en soufflant dans un bout de bois et connaît plein de manières de manger sans chasser. En utilisant un personnage qui leur ressemble, Anthony Pastor rend la préhistoire, période très appréciée des enfants, proche de ses lecteurs. Dans L’Invité surprise, Louis est aussi un personnage savoureux. Quand il a une idée, autant vous dire qu’il est inutile de tenter de l’en détourner. Pour lui, une seule solution pour combattre la mauvaise humeur qui s’est abattue sur sa famille qu’il juge trop ordinaire : ses parents doivent se séparer. Alors ils trouveraient de nouveaux compagnons et tout ce petit monde pourrait se réunir à l’occasion des fêtes, si possible à l’étranger, histoire pour notre héros d’améliorer ses notes en espagnol qui laissent à désirer. La méthode, inviter l’ami d’enfance de sa mère à la fête d’anniversaire de celle-ci. Sauf que rien ne se passe comme Louis l’avait prévu, et sa fausse bonne idée se retourne finalement contre lui. Ici, on est séduit par l’obstination aveugle du personnage qui rend la lecture de ses aventures jubilatoire. C’est un roman qui parle du divorce mais en le dédramatisant, ce qui fait un bien fou. Après une bonne tranche de rire en compagnie de ces livres, on en redemande !

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